Qu’est-ce que l’extradition ?

La France vient d’approuver la convention d’entraide judiciaire en matière pénale ainsi que la convention d’extradition entre la France et l’Ile Maurice.

L’occasion pour l’équipe de ASFE de donner quelques éclairages sur la procédure d’extradition.

Le champ d’application de l’extradition

L’extradition est une procédure par laquelle un État (l’État requérant) livre à un autre État intéressé (l’État requis), un individu poursuivi ou condamné qui se trouve sur son territoire aux fins de poursuites pénales ou d’exécution d’une peine.

Quelles sont les conditions nécessaires pour faire une extradition ?

Il y a différentes modalités à remplir pour l’extradition d’un individu :

  • Une convention d’extradition entre les Etats est nécessaire

La France est signataire de nombreuses conventions d’extradition multilatérales ou bilatérales :

Voici la liste des pays (hors UE) avec lesquels la France a signé un accord en matière extradition :

L’absence de convention bilatérale entre la France et un autre État ne signifie pas forcément l’impossibilité de procéder à une extradition. En effet, cela peut également dépendre de la ratification de conventions multilatérales incluant des dispositions sur l’extradition par les États concernés. Ces traités fournissent souvent un cadre juridique pour faciliter l’extradition, même en l’absence d’accords bilatéraux spécifiques.

Dans le cadre de l’Union européenne (demandes de remises entre États membres) la procédure privilégiée sera celle du mandat d’arrêt européen. Cette procédure simplifiée d’extradition entre les 27 États membres de l’Union européenne ne demeure qu’à titre résiduel.

  • L’individu doit être de nationalité étrangère

La France n’extrade pas ses nationaux, qu’ils possèdent ou non une autre nationalité que la nationalité française.

L’extradition ne peut donc concerner que les personnes de nationalité étrangère faisant l’objet de poursuites intentées au nom de l’État requérant ou d’une condamnation prononcée par ses tribunaux, trouvée sur le territoire de la République. La nationalité est appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise.

  • Il faut remplir certaines conditions liées à l’infraction

Concernant le lieu de commission de l’infraction, l’extradition n’est accordée par la France que si l’infraction a été commise :

• Soit sur le territoire de l’Etat requérant par un ressortissant de cet Etat ou par un étranger ;

• Soit en dehors de son territoire par un ressortissant de cet État ou par une personne étrangère à cet État.

La France n’extrade pas la personne lorsque les faits ont été commis sur le territoire de la République ou lorsqu’ils y ont été poursuivis et jugés définitivement.

Concernant les peines encourues ou prononcées, les cas pouvant entraîner une extradition sont ceux pour lesquels l’État demandeur prévoit des peines criminelles ou correctionnelles, c’est-à-dire des peines de prison de deux ans ou plus, ou lorsque la peine prononcée dépasse deux mois de prison.

De plus, les faits doivent également être considérés comme des crimes ou des délits aux termes de la loi française (principe de la réciprocité d’incrimination).

Enfin, l’extradition est refusée si les infractions sont punies dans l’État demandeur par des peines ou des mesures de sécurité contraires à l’ordre public français. Dès lors, il est impossible pour l’État français de procéder à l’extradition si la personne réclamée encoure : 

* La peine de mort dans le pays requérant ; 

* La violation de ses droits de la défense dans le pays requérant. 

Y a-t-il des obstacles à l’extradition des étrangers ?

L’extradition d’une personne de nationalité étrangère peut être limitée par des éléments personnels ou même liées à l’infraction commise. Ces limites peuvent tenir au :

  • Statut de réfugié

Il est interdit d’expulser ou de refouler une personne ayant le statut de réfugié.

  • L’âge ou la santé de la personne extradable

L’extradition d’un étranger peut être refusée si elle est susceptible d’avoir des conséquences d’une gravité exceptionnelle pour la personne réclamée, notamment en raison de son âge ou de son état de santé.

  • La vie privée et familiale

Une décision d’extradition ne doit pas porter atteinte de façon disproportionnée à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale.

  • La nature de l’infraction

La France refusera l’extradition si le crime ou le délit est considéré comme politique, c’est-à-dire s’il est clairement motivé par des raisons politiques, ou s’il est de nature militaire.

  • La règle de spécialité de l’infraction

À moins que la personne concernée ne renonce à ce droit, l’extradition n’est accordée que pour l’infraction spécifique qui a motivé la demande d’extradition, et cette infraction doit avoir été commise avant la remise de la personne concernée.

La procédure d’extradition

La procédure se déroule en plusieurs étapes :

La demande d’extradition

La demande d’extradition est initiée par voie diplomatique.

Elle doit être accompagnée de la décision de poursuite ou de condamnation à l’origine de la demande, ainsi que des textes de loi pertinents liés à l’infraction alléguée. Dans certains cas, un exposé des faits de l’affaire peut également être inclus.

Cette demande est ensuite transmise, avec le dossier complet, du ministère des Affaires étrangères au ministère de la Justice, qui la transfère au procureur général compétent territorialement pour examen.

Appréhension de l’individu réclamé et compétence du procureur général

Dans les 48 heures suivant l’arrestation, l’individu appréhendé est présenté au procureur général compétent, bénéficiant des droits du gardé à vue.

Le procureur général confirme l’identité de la personne recherchée et l’informe de :

  • La demande d’extradition,
  • De son droit à un avocat,
  • De la possibilité de consentir ou de s’opposer à son extradition,
  • Et des implications juridiques de ces choix, y compris la renonciation à la règle de spécialité.

Ensuite, le procureur général peut décider de laisser la personne en liberté. Sinon, il la présente à la cour d’appel, qui décide de l’incarcération et du placement en détention provisoire. Si la représentation de la personne à tous les actes de la procédure est jugée suffisamment garantie, elle peut être placée sous contrôle judiciaire ou assignée à résidence avec surveillance électronique jusqu’à sa comparution devant la chambre de l’instruction.

Saisine de la chambre de l’instruction et décision sur l’extradition

2 types de situations peuvent se présenter :

  • Si la personne recherchée accepte l’extradition, elle comparaît devant la chambre de l’instruction dans les 5 jours ouvrables suivant sa présentation au procureur général. Durant cette comparution, la chambre de l’instruction vérifie son identité et recueille ses déclarations. Cette audience est généralement publique. Si la personne confirme son accord pour être extradée lors de cette comparution, la chambre de l’instruction en prend acte dans les sept jours suivants. La décision de la chambre de l’instruction ne peut pas être contestée.
  • Si la personne recherchée refuse l’extradition, elle comparaît devant la chambre de l’instruction dans les 10 jours ouvrables suivant sa présentation au procureur général. Si elle maintient son refus lors de cette comparution, la chambre de l’instruction émet un avis motivé sur la demande d’extradition. Cet avis est rendu dans un délai d’un mois. Si la cour estime que les conditions légales ne sont pas remplies ou qu’il y a une erreur évidente, l’extradition est refusée. Dans le cas contraire, le Premier ministre, sur recommandation du ministre de la Justice, autorise l’extradition par décret. Si la personne recherchée est en liberté lorsque cette décision est rendue et qu’elle n’est pas contestée, le procureur général peut ordonner son arrestation. L’individu doit être remis à l’État demandeur dans les 7 jours suivant son arrestation. Sinon, il est libéré automatiquement.

Les effets de l’extradition

Une fois qu’une personne est extradée vers le pays demandeur, elle est soumise à la juridiction de ce pays et doit faire face aux accusations qui lui sont portées.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *