« Peu importe votre profil ou votre parcours, au Royaume-Uni chacun a sa chance »

big ben

Mise à jour février 2024

Élu meilleur pays européen pour entreprendre par la dernière étude annuelle Doing Business 2020 de la Banque Mondiale, le Royaume-Uni offre un environnement législatif très favorable aux auto-entrepreneurs du monde entier.

Cylia Rousset, Déléguée consulaire et entrepreneure indépendante à Londres, est l’organisatrice du groupe Facebook « Les Professionnels indépendants francophones de Londres (PIFL) ». Elle a accepté de répondre à nos questions au sujet de l’auto-entreprenariat français au Royaume-Uni.

Pouvez-vous nous présenter le groupe « Professionnels indépendants francophones de Londres » ? Qu’est-ce qui fait le succès du PIFL qui compte plus de 2000 membres ?

Notre groupe est avant tout convivial et bienveillant. La mission principale étant de s’entraider pour promouvoir nos business respectifs. Les rencontres que nous faisons au sein du groupe, notamment à l’occasion de nos soirées networking, nous permettent de nous recommander les uns les autres auprès de nos réseaux respectifs ou sur les réseaux sociaux. Le groupe rassemble une immense variété de business ce qui fait que nous sommes tous à la fois potentiellement prestataires ou clients des autres membres du groupe, c’est une vraie force. Par ailleurs, l’accès au groupe est gratuit, et la participation aux soirées networking mensuelles est limitée à £5. Nous ne faisons surtout pas la « course » au nombre de membres et veillons à filtrer les demandes pour rejoindre le groupe (et nous assurer qu’elles correspondent bien à des personnes vivant au UK et ayant un projet d’entrepreneuriat) et également à modérer au mieux les posts dans le groupe pour éviter les spams (qui sont monnaie courante dans beaucoup d’autres groupes Facebook de Français à Londres).

Participants à un évènement du groupe PIFL

La formule du « self-employed » attire beaucoup de Français outre-Manche. Quelles sont, à votre avis, les raisons de ce choix ? En quoi le climat de affaires est-il plus favorable au Royaume-Uni qu’en France ?

Il est clair que les démarches pour démarrer son activité en tant que « self employed » (auto-entrepreneur ou freelance) sont extrêmement simples au Royaume-Uni. Il suffit de posséder un NIN (National Insurance Number) et de s’enregistrer en ligne auprès du HMRC (HM Revenue and Customs) pour obtenir son UTR (Unique Tax Reference number), puis de faire sa déclaration de revenus (toujours en ligne) chaque année fiscale. Nulle obligation d’ouvrir un compte bancaire « pro », de logiciel de comptabilité (tant que vous n’êtes pas soumis à la TVA), pas de charges sociales (hormis la contribution volontaire pour la National Insurance). On peut ainsi lancer son activité très rapidement et facilement et se concentrer sur le business plutôt que sur les démarches administratives. La transition ensuite en Limited Company est elle aussi simple et rapide. Je pense que c’est ce qui rend l’entrepreneuriat plus attrayant qu’en France, il y a moins de barrières pour oser se lancer.

Vous vivez au Royaume-Uni depuis 2008 et êtes organisatrice du groupe PIFL depuis quatre ans. Quelles sont les problématiques que les auto-entrepreneurs français rencontrent le plus souvent au Royaume-Uni ?

Les principales problématiques que rencontrent les auto-entrepreneurs français aux UK sont sans doute dans un premier temps la barrière de la langue, que ce soit pour les démarches administratives ou ensuite pour la communication et la promotion de leurs business. Mais également le fait de se constituer une clientèle, une tâche assez difficile lorsque l’on se rend dans un pays étranger, et que l’on ne peut pas forcément s’appuyer sur son réseau existant. C’est pourquoi le fait de pouvoir s’entraider entre expatriés, notamment grâce à des groupes tels que les PIFL et de pouvoir profiter d’un réseau de professionnels rencontrant potentiellement les mêmes problématiques que nous est très utile. 

L’accès au statut d’auto-entrepreneur est-il plus compliqué après le Brexit pour les citoyens européens ?

Le Brexit n’a pas changé les démarches qui restent très simples, mais en revanche il impose désormais d’avoir les autorisations nécessaires pour travailler au Royaume-Uni (pre-settle ou Settle Status, Citoyenneté britannique ou visa de travail) pour pouvoir s’enregistrer.

Il peut s’agir d’une Start-up VISA ou Innovative VISA : pour créer et gérer un business innovant et totalement inexistant aux UK avec un fort potentiel de croissance. La candidature devra être approuvée par un établissement britannique d’enseignement supérieur pour le Start-up VISA et dans le cas du Innovative VISA, par une organisation commerciale de type business angels agréée par le gouvernement.

Le Global Talent Visa est également disponible et réservé aux “leader” et “potentiels leader” dans les domaines suivants : technologies digitales, arts et culture ou domaine universitaire et recherche. La candidature doit généralement être approuvée par un organisme britannique expert dans le domaine du candidat.

Tout ceci à un coût, compter £363 pour la startup VISA, avec une validité de 2 ans. £1,021 pour l’Innovator VISA valable 3 ans avec possibilité de renouvellement. Ou encore £608 pour le Global Talent Visa, avec une validité allant jusqu’à 5 ans renouvelable.

Donc en effet cela complique fortement les choses pour les citoyens européens qui souhaitent s’installer au Royaume-Uni pour y démarrer leur activité.

Selon les données du Bureau National des Statistiques (Office of National Statistics), après deux décennies de croissance, le nombre d’auto-entrepreneurs au Royaume-Uni a connu une forte baisse pendant la pandémie de Covid-19 (de 15.3% de l’emploi total en 2019, à 12.9% en 2021). De quelle manière la communauté française des auto-entrepreneurs au Royaume-Uni a-t-elle vécu la pandémie ? Y-a-t-il des signaux encourageants de reprise en 2022 ?

En effet, dans notre groupe des PFIL nous avons vu bon nombre d’entre nous rentrer en France, au moins provisoirement au début pour le confinement, et finalement ne pas revenir et fermer leur business. Malgré les aides financières offertes par le gouvernement britannique, certains n’ont pas pu « survivre » suffisamment longtemps après avoir été contraints de fermer leurs portes (salons de coiffure, beauté, activités culturelles, cours en groupe, événements, restauration…). Mais beaucoup ont au contraire su se réadapter très rapidement et intelligemment pour travailler et proposer leurs services/produits online. Malgré le Brexit et la pandémie, notre groupe continue de s’agrandir. Nous accueillons de nouveaux entrepreneurs à chaque soirée networking, et le dynamisme de notre communauté ne faiblit pas.

Avez-vous quelque chose à rajouter ?

J’aimerais rassurer et encourager ceux qui hésitent encore à se lancer dans l’aventure entrepreneuriale, en leur disant qu’ici au Royaume-Uni l’état d’esprit est toujours positif quel que soit le projet. Peu importe votre profil ou votre parcours chacun a sa chance et est jugé sur sa personnalité et ses compétences, pas uniquement sur son diplôme ou son expérience. Ceux qui réussissent ne sont pas jalousés comme cela peut l’être souvent en France par exemple, mais sont des mentors ou des modèles pour les autres.

Cylia Rousset, Déléguée consulaire à Londres et organisatrice du groupe « Les Professionnels indépendants francophones de Londres »

Depuis notre dernier témoignage réalisé en octobre 2022, quelles sont les avancées majeures de votre projet ?

Après la pause imposée par le COVID, l’affluence à nos soirées networking a repris progressivement et bat aujourd’hui son plein avec plus de 40 participants à chaque fois. Notre groupe Facebook compte aujourd’hui plus de 2200 membres, dont 500 membres « actifs » qui participent régulièrement aux soirées. Chacun peut rejoindre le groupe gratuitement, seule une participation de 10£ pour chaque soirée est demandée au lieu de 5£ avant. 

En novembre 2023, j’ai remporté le Prix du Public des premiers Trophées des Français du Royaume-Uni, organisés par Le Petit Journal. Cela a donné un véritable coup de projecteur sur notre groupe et j’ai eu le plaisir d’y accueillir de nombreuses nouvelles personnes depuis.

Quel bilan pouvez-vous dresser sur votre groupe « Professionnels indépendants francophones de Londres » ?

Créés en 2014, les PIFL font désormais partie du « paysage » londonien et ont su résister au départ de leur fondatrice Mélanie (j’ai repris le groupe en 2018), puis au COVID, puis au Brexit (entraînant de nombreux départs au sein de la communauté française de Londres). Beaucoup d’autres initiatives similaires n’ont pas tenu aussi longtemps. Nous gardons une audience stable voire grandissante. A chaque soirée networking une dizaine de nouvelles personnes viennent nous retrouver, ce qui crée une belle dynamique. Notre présence sur LinkedIn et Instagram croît elle aussi depuis 2022, même si le groupe Facebook reste le principal lieu d’échange et d’entraide.

Comment voyez vous votre projet dans 5-10 ans ?

Tout d’abord j’ai comme projet à court terme de faire un re-branding et de changer le nom du groupe. « Professionnels Indépendants Francophones de Londres » est en effet long donc difficile à mémoriser et beaucoup peinent à nous « taguer » sur les réseaux sociaux. Nous garderons uniquement l’acronyme PIFL qui est lui connu de tous ! 

Je pense que la formule actuelle de soirées networking conviviales et informelles convient parfaitement aux « petits » business et qu’elle continuera à attirer dans la durée les porteurs de projets et entrepreneurs francophones.

Participants aux soirées PIFL 2023-2024

Un commentaire

  1. Bonjour,
    Je reviens de trois mois à Londres, je suis tombée amoureuse de la ville et j’y retrouve cette grande ouverture d’esprit décrite dans cet article ! J’aimerais savoir en temps de Brexit comment accéder à un permis de travail 🙂 je vais lancer mon activité freelance dans l’accompagnement thérapeutique à travers deux méthodes semblables à la kinésiologie qui n’existent qu’en France et pour l’une des deux en Belgique, Suisse et Canada. Comme ce ne sont pas des diplomes d’Etat, je me demandais quel était le meilleur moyen car je n’arrive pas à comprendre dans quelle catégorie je fais partie. Aussi je vais commencer des séances bénévoles à distance pour une fondation à Londres qui aide les femmes en difficultés à acceder à des services autour de la santé mentale. Est ce que cela pourrait aussi jouer à mon avantage ?
    Merci d’avance,
    Sarah

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *