The Sorority : une application aux côtés des Françaises de l’étranger contre les violences faites aux femmes

Cette semaine, l’équipe de l’ASFE s’est entretenue avec Priscillia ROUTIER-TRILLARD, qui a fondé en 2019 « THE SORORITY », une communauté et application d’entraide gratuite et permettant aux femmes de trouver à tout moment du soutien, une écoute attentive, des conseils ou encore un lieu sûr pour fuir en cas de violences conjugales, intra-familiales ou encore de harcèlement. Elle a accepté de répondre à nos questions. 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? 

Je suis Priscillia la Fondatrice de THE SORORITY, j’ai 35 ans, je suis maman de 2 petits garçons et je suis expatriée depuis fin 2019 à Dubai (suivi de conjoint). 

 Comment est née l’idée de THE SORORITY ? Quel était votre objectif ?

J’ai eu l’idée de THE SORORITY à la suite de mon second burn-out début 2019, j’étais alors manager d’une trentaine d’ingénieurs dans le domaine des Technologies de l’Information. Le parcours pour sortir de ce burn-out a été jalonné de rencontres et de prises de conscience qui m’ont amenée à imaginer ce réseau d’entraide bienveillant permettant d’assurer ensemble, en utilisant la technologie au profit de l’humain, notre sécurité et notre épanouissement. Nous ne sommes plus seul.e.s et nous sommes partout.

 Pouvez-vous nous parler un peu de l’application en elle-même ? Comment fonctionne t-elle ?

THE SORORITY est une communauté de plus de 41 300 personnes à ce jour (octobre 2022). Elle est dédiée aux femmes et aux personnes issues des minorités de genre pour éviter le contact avec un (ex)conjoint violent ou harceleur. À terme, nous ouvrirons ce réseau aux hommes souhaitant aider et/ou vivant eux-mêmes des violences (nous sommes en recherche de fonds et de soutiens pour y arriver, étape par étape).

Chaque profil est vérifié et validé à la main. En tant qu’ancienne Responsable RGPD cette sécurité a été le fondement de tout ce sur quoi THE SORORITY a été imaginée et bâtie.

L’application THE SORORITY est gratuite et disponible sur les stores Android et iOs en France, en Belgique, en Suisse, au Luxembourg, en Algérie, au Maroc, en Tunisie et à présent au Canada. Chaque personne peut à tout moment y trouver une écoute bienveillante, de l’aide, du soutien ou encore un lieu sûr pour fuir en cas de danger immédiat (via l’Alerte, la Carte, le Chat ou encore la fonction Recherche).

THE SORORITY est une proposition concrète pour lutter contre les violences et pour l’égalité entre tou.te.s. Partout dans le monde. Ensemble.

Pour les chiffres à date, nous sommes (au 03/10/22) : 

  • 41 331 personnes utilisateur.ices de THE SORORITY au profil vérifié et validé, parmi lesquelles :
  • 3 332 proposent un lieu sûr pour fuir ;
  • 6 718 proposent de l’aide, une écoute attentive ou encore du soutien ;
  • 732 personnes se disent en recherche active d’un lieu sûr pour fuir ;
  • 830 en recherche d’aide/soutien dans le cadre de violences subies pour elles ou un.e proche.

Quels retours des utilisateurs avez-vous ? 

Nous faisons des entraînements tous les mois afin de permettre à nos utilisateur.ices de prendre en main l’application, s’entraîner à agir et réagir – casser l’effet de sidération vécu en cas de violence et voir concrètement comment elle fonctionne et quel est le réel délai de réponse de la communauté autour d’elle en cas de danger immédiat.

Les retours sont unanimes, nous les publions régulièrement sur nos réseaux (@jointhesorority), notre site (www.jointhesorority.com : Ensemble des témoignages) et nous avons des retours réguliers sur nos stores également (voir THE SORORTY sur les stores iOs et Android).

Les personnes sont agréablement surprises de la rapidité de réponse (moins d’une minute) et du nombre de prises de contact : en général sur les 50 personnes recevant l’alerte autour de nous, 10 prennent contact dans les secondes/minutes suivant le lancement de l’alerte. Parmi elles 3 à 4 personnes appellent directement pour savoir si tout va bien, le reste échange via le chat pour savoir si tout est OK, si elles peuvent aider, contacter les autorités pour la personne – si elle le demande, récupérer le maximum d’informations possibles (adresse exacte, code d’accès, étage, personne armée, avec enfant(s), etc.

Que la personne se trouve dans une grande ville ou dans une zone plus reculée, la mobilisation est toujours aussi puissante en cas d’alerte grâce à l’utilisation de la technologie (pas de limitation géographique).

Cela fait trois ans que vous avez fondé THE SORORITY en étant hors de France : à quels défis avez-vous été confronté ?

La distance avant tout évidemment. J’ai imaginé THE SORORITY depuis la France mais son lancement sur les réseaux s’est fait à distance : nous étions en plein confinement durant la phase de Bêta-test en avril 2020. Au final nous étions déjà prêts pour travailler à distance, le COVID ne nous a pas perturbés à ce niveau, au contraire, nous étions comme tout le monde, confinés. Nous avons pu aider et soutenir beaucoup de personnes isolées dès nos débuts (plus de 1 000 bêta-testeuses dès les premières semaines) avec la montée des violences durant cette période.

Pour ce qui est de la communication avec notre communauté, les équipes et des liens avec les associations et acteur.ices de terrain, la majeure partie des échanges s’est faite par visio, comme pour le reste du monde à cette période.

J’ai réussi à faire plusieurs allers-retours durant cette période, importants sur le plan humain, pour tenir et continuer à agir. Ce qu’on fait demande beaucoup d’énergie, une bonne stabilité psychologique et du temps. C’est un investissement complet. Bien s’entourer et passer du temps ensemble sur le terrain dès qu’on le peut est important.

Avez-vous des projets pour THE SORORITY FOUNDATION ? 

Oui plein ! On n’en est qu’au début. L’équipe de l’association s’agrandit. De plus en plus d’acteur.ices du terrain nous rejoignent. Je suis convaincue qu’en unissant nos forces et nos compétences nous sommes capables de soulever ensemble des montagnes. C’est en train de se produire.

Les prochaines étapes aux côtés de l’ASFE seront la poursuite de notre ouverture au fur et à mesure dans les pays qui nous demandent dans le monde : notre communauté d’expatrié.e.s est vraiment partout et nous suit pour beaucoup depuis le tout début.

La prochaine ouverture programmée ensemble est le Canada – cette semaine – puis nous allons poursuivre ainsi pays par pays en alliant nos contacts, nos relais et nos forces sur le terrain pour atteindre les personnes isolées recherchant cette aide. Qu’elles sachent qu’elles ne sont pas seul.e.s.

Nous travaillons notamment avec l’ASFE sur la mise en place d’une plateforme globale de prise en charge, de soutien et de suivi dédiée aux femmes françaises établies hors de France subissant des violences (physiques, psychologiques, économiques ou encore sexuelles).

Nous avançons petit à petit. Le chemin est long mais on ne lâchera rien.

Quels conseils donneriez-vous pour les personnes qui souhaiteraient créer leur projet ? 

Ne lâchez rien. Monter un projet de 0 est très prenant sur tous les plans. Il y a beaucoup de doutes. On ne sait pas où on va, ni si cela va marcher. Nos proches souvent ne souhaitent que notre bien mais nous rajoutent une nouvelle couche de doutes en posant beaucoup de questions et en s’inquiétant pour nous.

Je pense que c’est un chemin que l’on doit mener dans un premier temps seul.e pour bien poser les bases et être au clair dans sa tête sur ce que l’on souhaite. Puis dans un second temps, s’entourer – au fur et à mesure – de personnes qui y croient, qui seront passionnées et qui feront tout pour mener à bien, ensemble, ce beau projet.

Le temps fera le reste, c’est lui qui vous dira si vous êtes allé ou pas dans la bonne direction.

Ma seule devise est :  aucun regret.

Essayez, donnez tout et vous verrez. Au pire vous apprendrez.

Avez-vous quelque chose à ajouter ?

Merci à toutes les personnes qui de près ou de loin ont contribué à rendre THE SORORITY ce qu’elle est. Nous sommes partis de rien et nous sommes aujourd’hui plus de 41 000 personnes à s’entraider partout dans le monde. Cela prouve la puissance et le pouvoir du collectif. Le bouche à oreille, le réseau, ce qu’on est capable de faire quand on en a la volonté, en unissant nos forces.

Merci à Fanny CHEVALIER (au graphisme), Thibaud DERVILY et Adrien SAULNIER (au développement) sans qui THE SORORITY n’existerait pas.

Merci à vous tou.te.s de la faire vivre au quotidien, d’être aussi engagé.e.s, disponibles et volontaires pour faire bouger les choses.

Merci à l’ASFE pour son soutien.

On continue, on ne lâchera rien. On va y arriver. Ensemble.

Priscillia ROUTIER-TRILLARD, Fondatrice THE SORORITY

4 commentaires

  1. Un courage et une détermination admirables. Je vous souhaite une belle réussite dans ce projet généreux et nécessaire.

  2. Extraordinaire initiative, merci pour tous les bénéficiaires, aujourd’hui et demain.

    Et un grand merci pour vos conseils a celles/ceux qui ont un projet: ce que vous t est tellement vrai, et vos conseils stimulent.

    Ways to go

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