L’article 87 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose que « les fonctionnaires, les militaires ou les magistrats détachés dans une administration ou un organisme implanté sur le territoire d’un Etat étranger ou auprès d’un organisme international peuvent demander, même s’ils sont affiliés au régime de retraite dont relève l’emploi ou la fonction de détachement, à être affiliés et à cotiser au régime de retraite régi par ce code au titre de cet emploi ou de cette fonction ». Un décret paru le 26 avril dernier augmente de 16 points la cotisation volontaire au régime de retraite d’origine pour les personnels détachés, passant de 11,1% à 27,77% à compter du 1er mai 2022.
Rappelons que cela concerne les personnels détachés directement dans les établissements partenaires du réseau AEFE (environ 2800 personnes) mais également tous fonctionnaires français détachés à dans une institution à l’étranger.
Arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne
Ce décret serait la conséquence d’une arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 6 octobre 2016 qui a jugé l’écrêtement de la pension française des fonctionnaires illégal. La règle de l’écrêtement interdisait que le montant total des pensions perçues n’excède le montant de la pension nationale que l’intéressé aurait acquise en l’absence de détachement. Si tel était le cas, la pension française était alors réduite à concurrence du montant de la pension étrangère acquise lors de ce détachement.
Pour contourner l’interdit de l’écrêtement qui aurait mécaniquement conduit à une hausse des pensions servies, le gouvernement a relevé le montant de la cotisation volontaire.
Une hausse non sans conséquences
Comme le rapporte le Canard enchaîné cette semaine, un professeur certifié au 9e échelon avec une rémunération de 2765 euros brut qui payait 307 euros de cotisation mensuelle devrait avec, ces nouvelles dispositions, s’acquitter désormais de 766 euros par mois. Un surcoût annuel de 5 508 euros, qui pèsera soit sur les détachés, soit dans le cas des personnels de l’Education nationale, sur les établissements AEFE ou bien encore sur les familles avec une augmentation des écolages.
C’est donc tout l’équilibre du réseau qui est en péril. Alors que l’AEFE vient de mettre un terme au recrutement aux contrats dits de résidents au recrutement différés, ce nouveau pavé dans la mare fait craindre la substitution totale des titulaires de l’Education nationale par des contrats locaux.
Report du décret
A la suite d’une forte mobilisation de l’ensemble des acteurs du réseau éducatif – que cela soit les enseignants qui se sont mis en grève le 24 mai dernier, les organisations syndicales, les représentants des familles d’élèves, les parlementaires et les élus locaux des Français établis hors de France, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, l’AEFE et le ministère de l’Education nationale – un décret paru le 25 mai a reporté la date d’entrée en vigueur de l’augmentation de la cotisation au 1er octobre 2022. Celle-ci ne concernera donc que les détachements à partir de la rentrée 2023.
Vers une annulation ?
Lundi 30 mai, lors d’une table ronde réunissant les principaux acteurs de l’enseignement français à l’étranger, le groupe d’études du Sénat « Statut, rôle et place des Français établis hors de France », a demandé une étude d’impact avec une cartographie précise des personnels détachés et un bilan de leur évolution depuis 2015. Cette étude d’impact viendra en complément de la concertation souhaitée par la Direction générale de la mondialisation du MEAE qui rassemblera les acteurs concernés dès le mois de septembre.
Toujours selon le Canard enchaîné qui a contacté le cabinet de la Première ministre, ce nouveau décret de report sera lui-même bientôt « abrogé ».
Affaire à suivre…