L’Espagne pionnière dans la lutte contre les violences faites aux femmes

justice

Premier article d’une série consacrée à la prévention et à la sensibilisation des violences faites aux femmes en Espagne par Claire Bastien, membre de l’ASFE Espagne.

Les Nations Unies considèrent que la violence contre les femmes se manifeste par des préjudices ou des souffrances physiques, sexuelles et psychologiques. La maltraitance dans le couple pouvant aller jusqu’au féminicide est la forme la plus connue des violences contre les femmes.

En 2018, selon Eurostat, 149 personnes sont décédées en France, tuées par leur partenaire ou ex-partenaire. Plus de 80 % des victimes de ces crimes sont des femmes.

Incidence des féminicides en Europe en 2017

En violet, les homicides perpétrés par les conjoints et en vert ceux commis par un membre de la famille

Source : https://www.balcanicaucaso.org/aree/Europa/Femminicidio-in-Europa-due-anni-dopo

La Lettonie, le Royaume-Unis et la Hongrie sont les pays européens où l’on décompte le plus de victimes.

En Europe de l’Ouest, le nombre moyen de victimes de féminicides est de 0,4 victimes / 100.000 femmes. La France se classe derrière l’Allemagne avec 1,8 féminicides par million d’habitants. Quant à l’Espagne, elle se situe près de l’Italie avec respectivement 0,2 et 0,1 homicides de femmes par million d’habitants.

Dans la plupart des cas, le partenaire est l’auteur du crime. Cependant, en Lituanie et Bosnie Herzégovine, la plupart des féminicides sont commis par des membres de la famille.

Au niveau européen, ce n’est qu’en 2014 que la convention d’Istanbul a contraint les Etats membres de l’Union Européenne à mettre en place des mesures préventives et punitives concernant les violences faites aux femmes.

POURQUOI L’ESPAGNE EST ELLE PIONNIERE DANS LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ?

L’Espagne est à l’avant-garde pour la lutte contre les violences faites aux femmes et la courbe du nombre de victimes de violences de genre est démonstrative En effet, le nombre de féminicides a considérablement diminué. Il est passé de 76 femmes assassinées par leur conjoint ou ex partenaire en 2008 à 43 victimes en 2021.

Nombre de femmes décédées aux mains de leurs partenaires – Espagne 2003 à 2021

Cette diminution exemplaire est principalement liée aux mesures suivantes :

Dès 1999, la réforme du code pénal en matière de protection des personnes condamne à une peine de prison d’un à trois ans, toute personne ayant effectué des actes contre la liberté ou l’intégrité sexuelle d’une autre personne en l’absence de consentement.

En 2001, le Président Aznar élabore un plan d’action contre la violence domestique.

C’est le Président Zapatero qui a fait progresser significativement la lutte contre les violences faites aux femmes. En 2004 le Parlement espagnol vote une loi organique (conforme à la Constitution de 1975 et votée à la majorité absolue) qui introduit d’importantes réformes pénales, civiles et sociales. Cette loi assure la mise en place de mesures de protection avec :

– des bureaux d’aide et d’assistance juridique et psychologique pour les femmes victimes de violences ;

– Un parquet et des tribunaux spécialisés avec des magistrats exclusivement dédiés à la lutte contre les violences de genre. Même si la victime ne porte pas plainte, l’État espagnol peut le faire à sa place pour peu qu’il y ait des témoignages jugés probants.

 Depuis 2009, des bracelets électroniques ont été introduits pour surveiller les conjoints violents.

La presse est très active, diffuse amplement tous les cas de violence conjugale et les meurtres des femmes victimes de leur conjoint ou ex partenaire pour rendre visibles auxyeux de la société ces crimes bien particuliers. Seule réserve, la presse ne parle que très peu des violences psychologiques contre les femmes.

L’Espagne a fait un autre pas en avant en décembre 2021, en distinguant dans les chiffres des victimes différents types de féminicide : les féminicides «familiaux» (le meurtre d’une femme par un membre masculin de sa famille), «sexuels» (le meurtre d’une femme par un homme qu’elle ne connaît pas à la suite d’une agression sexuelle), «sociaux» (le meurtre d’une femme par un homme à la suite d’une agression non sexuelle) et «parprocuration» (le meurtre d’une femme par un homme comme moyen de causer préjudice à une autre femme).L’arsenal judiciaire espagnol de lutte contre les violences faites aux femmes, est unique et explique que l’Espagne soit considérée comme un modèle dans la lutte contre les violences faites aux femmes.Un certain nombre d’institutions, « Instituto de la Mujer », la « Delegación del Gobierno contra la violencia de género » et de nombreuses associations féministes déploient également des actions visant à protéger les femmes victimes de violences domestiques et éviter les féminicides.

LA VOLONTÉ POLITIQUE EST ESSENTIELLE POUR LUTTER CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

Depuis plus de 20 ans, il y a eu une véritable volonté politique de diminuer le nombre de cas de violences. Le débat est permanent depuis 1999. Le Président José Luis Zapatero a donné une impulsion majeure avec la loi de 2004 visant à instaurer des « mesures de protection intégrale contre la violence de genre ». En 2007, une loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes est votée et à pour but de changer les attitudes et comportements masculins. Dès 2012, l’Espagne s’est dotée d’un ministère pour l’égalité des genres.

Aujourd’hui, l’alliance récente au sein de la Communauté Autonome de Castilla y León entre le Partido Popular et le parti d’extrême droite Vox est préoccupante. En effet, Vox propose de multiples amendements lors des débats sur la violence de genre.

Javier Ortega Smith, secrétaire général de Vox, a déclaré ne pas être « contre les femmes », et vouloir au contraire « leur protection », mais s’opposant « à cette idée féministe radicale selon laquelle il faut que les deux sexes s’affrontent, et qu’il faut combattre l’homme en tant qu’incarnation du mal absolu.». Le projet de Vox est l’abrogation du mariage homosexuel, du droit à l’avortement et des principales dispositions légales spécifiquement favorables aux femmes dont notamment la loi organique de 2004 dédiée à la protection intégrale contre la violence de genre.

Claire Bastien

2 commentaires

  1. j’aimerais entrer en contact avec Claire Bastien , je suis président du Relais des Possibles à Aix en provence et pour le jubilé des 40 ans de cette association en Juin 2023 qui accueille des Femmes Victimes de Violence avec enfants de moins de trois an s je souhaite organiser en particulier une journée avec une ample information sur ce qui se passe ailleurs et souvent mieux que chez nous en France . Cordialement <; Jean Pierre lanfrey

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