Dimanche matin, la capitale croate a été victime d’un tremblement de terre de magnitude 5,3 sur l’échelle de Richter. Le plus fort séisme jamais ressenti depuis 140 ans a fait de nombreux dégâts matériels. Un nouveau défi est à relever pour les autorités publiques déjà fortement préoccupées par la lutte contre l’épidémie de Covid-19.
L’équipe de l’ASFE a pu s’entretenir avec Hervé Rousseau, candidat de l’Alliance Solidaire des Français de l’Etranger (ASFE) – circonscription de Croatie pour les prochaines élections consulaires, sur cette situation particulière que les quelques 800 000 habitants de la capitale croate sont en train de vivre.
Quelle est la situation actuelle à Zagreb ?
Plusieurs séismes frappent depuis dimanche matin la Croatie en pleine lutte contre l’épidémie du coronavirus. L’épicentre situé à 7km au nord de Zagreb a entraîné depuis 48 heures selon les services sismologiques plus de 60 secousses d’intensités variables. Le séisme le plus violent a été celui de dimanche à 6h30 avec une magnitude de 5,5 sur l’échelle de Richter qui a largement endommagé le cœur historique de la capitale croate. Cela fait 140 ans qu’un tel déchaînement de la nature ne s’était produit sur Zagreb.
Quelles sont les conséquences directes de ce tremblement de terre sur le plan humain, matériel et organisationnel ?
De nombreuses victimes sont à déplorer. Une jeune fille de 15 ans est décédée des suites de ses blessures sous l’éboulement de son appartement dans le centre-ville et une trentaine de personnes grièvement blessées ont été hospitalisées. Les dégâts matériels sont importants avec plus de 7000 bâtiments endommagés. Dans les vieux quartiers du centre de Zagreb, des façades de bâtiments se sont effondrées, de nombreuses parties de la ville sont restées sans électricité et plusieurs centaines d’habitants ont été évacuées. Une des tours de l’emblématique cathédrale a elle aussi été violemment touchée avec l’effondrement de sa flèche. La basilique du Sacré-Cœur, deuxième plus important édifice religieux de la ville, est en partie détruite. De nombreuses églises sont meurtries ainsi que des musées et des bâtiments historiques.
La Croatie tente elle aussi d’endiguer l’épidémie de coronavirus par des mesures de confinement. Les dégâts causés par le séisme de dimanche matin ne risquent-ils pas de freiner le combat contre le virus ?
Ce tremblement de terre intervient en pleine épidémie de coronavirus qui n’a pas épargné la Croatie également, ce qui fait de ce pays le seul au monde à devoir faire face au même moment à une double catastrophe, sanitaire et naturelle. Le respect des consignes de sécurité des autorités croates qui ont été renforcées est plus que jamais de rigueur et il est fait appel incessamment au civisme de la population. La situation est particulièrement compliquée car les populations sont confinées en raison du virus mais doivent quitter leur habitat et descendre dans les rues lors de nouvelles secousses tout en se tenant à deux mètres de distance pour se protéger d’une éventuelle infection au coronavirus. “Maintenez la distance. Ne vous regroupez pas. Nous sommes confrontés à deux crises sérieuses, le séisme et l’épidémie”, a déclaré le ministre de l’Intérieur Davor Bozinovic.
Les Croates, qui ont connu la guerre il y a 25 ans, font preuve, face à cette double tragédie, de beaucoup de courage, d’abnégation et de solidarité. Il n’y pas eu de scènes de panique ou de mouvement de foule. Les supporters du Dinamo Zagreb, les BBB, se sont mobilisés dès dimanche pour sauver des vies. Ils sont intervenus à la plus grande maternité de la ville largement endommagée pour aider à l’évacuation en urgence des couveuses, des nouveau-nés, des nourrissons et de leurs mamans (deux enfants sont nés au moment du plus violent séisme !) avec des températures avoisinant 0 degré. La jeunesse de Zagreb était également présente dans l’un des grands hôpitaux de la ville touché par des éboulements pour transporter les patients vers d’autres unités de soins.
Deux compagnies de la 1ère brigade de l’armée croate sont engagées pour aider la ville et les habitants à remédier aux graves séquelles du séisme. Une partie des habitants du centre-ville a été relogée dans la cité universitaire préservée ainsi que dans les écoles désertées en raison de la pandémie. L’armée croate nettoie les principales artères du centre-ville de Zagreb.
La Croatie a activé le mécanisme de protection civile de l’UE. Lors d’une intervention d’urgence, la Commission a déjà aidé à envoyer des tentes, des lits, des matelas, des chauffages et des sacs de couchage de Slovénie, de Hongrie, d’Autriche et d’Italie, qui sont en cours d’acheminement. En outre, le programme de satellites Copernic de l’UE, qui fournit des services d’information collectés par l’observation de la Terre par satellites, aide à produire des cartes de la zone touchée. « L’Union européenne est là pour aider la Croatie en ces temps difficiles. L’aide européenne est déjà en route et je remercie la Slovénie, la Hongrie, l’Autriche et l’Italie pour leur offre par le biais du mécanisme de protection civile. Nos pensées vont aux personnes concernées et aux services nationaux. Nous sommes prêts à fournir une assistance supplémentaire », a déclaré le commissaire aux crises Janez Lenarcic.
L’Ambassade de France n’est pas en reste puisque l’Ambassadeur, le Consul et son équipe se sont mis à la disposition permanente des Français, nationaux et binationaux, actuellement dans le pays et la capitale.
Comment le gouvernement réagit-il face à la combinaison de ces deux crises ?
Le Premier ministre Andrej Plenkovic, dont le pays assure actuellement la présidence de l’UE, alors que le continent fait face à sa plus grande crise depuis la Seconde Guerre mondiale, a annoncé un certain nombre de mesures économiques pour contrer ces deux fléaux. « Nous devons nous préparer à une bataille difficile et prolongée pour préserver l’avenir de notre pays. C’est pourquoi le gouvernement a présenté le premier paquet de 63 mesures d’une valeur de 30 milliards de HRK (environ 4 milliards €). Il s’agit de la première phase de nos mesures. Il est plus important que jamais de sauver l’activité économique », a-t-il déclaré.
Sur le front du Coronavirus, les autorités croates ont pris rapidement des mesures préventives et de confinement. Le pays a fermé ses frontières terrestres et maritimes. Seuls les magasins de première urgence sont ouverts (alimentation, pharmacies, animaleries) ainsi que les postes et banques avec des horaires restreints. Depuis huit jours restaurants et cafés ont fermé leur porte. La population croate est bien évidemment appelée à rester chez elle sauf en cas de nécessité justifiée. Les villes sont confinées, la police filtrant les entrées et sorties. Les directives sont respectées par une population disciplinée et le pays jusqu’à présent ne déplore que 355 cas de Covid-19 pour un seul décès.
Avez-vous quelque chose d’autre à ajouter ?
Les nouveaux héros du pays sont les responsables de la cellule de crise, avec à sa tête le ministre de l’Intérieur, Davor Bozinovic, assisté du ministre de la Santé, du directeur de la Santé publique et de la directrice de la Clinique des maladies infectieuses. L’ensemble de la population approuve leur action et les Croates obligés au confinement suivent chaque jour avec attention sur leur petit écran les fréquentes déclarations et comptes rendus des responsables qui leur interdisent de désespérer de l’avenir.
Séisme au temps du coronavirus, un scénario invraisemblable, mais les Croates ne tremblent pas.
L’équipe de l’ASFE