Suicide à l’échelle mondiale : un état des lieux alarmant

Le suicide n’est ni un phénomène nouveau, ni réservé aux seuls pays occidentaux. Le sociologue Emile Durkheim l’étudiait déjà au XIXème. Il touche tous les pays et concerne toutes les catégories de populations. Pénalisé dans certaines destinations (illégal, caché et répertorié dans la case « accident » dans des registres) ; stigmatisé dans la plupart ; force est de constater qu’en obtenir des chiffres fiables n’est pas toujours facile. L’Organisation Mondiale de la Santé a publié un rapport éclairant sur le sujet en 2014 – même si les données chiffrées sont à considérer avec précaution et probablement sous-estimées.

Chiffres

Dans le monde, un suicide survient toutes les 40 secondes. Les derniers chiffres font état de 804 000 morts par an. Les tentatives de suicide seraient, quant à elles, apparemment 20 fois plus nombreuses. Le taux de suicide global standardisé est de 11,4 pour 100 000 habitants (15 chez les hommes et 8 chez les femmes). Le suicide occasionne ainsi plus de décès que les guerres ou catastrophes naturelles.

Le suicide représente la deuxième cause de mortalité chez les 15-29 ans et la quinzième sur la population totale. Le suicide est beaucoup plus répandu chez les personnes âgées de plus de 70 ans.

Modus operandi

La pendaison est la méthode la plus utilisée, suivie par les armes à feux chez les hommes et les médicaments chez les femmes. Dans les zones rurales des pays à faibles revenus et intermédiaires, l’intoxication par ingestion de pesticides est privilégiée (20%).

Facteurs de risques

Les violences, l’isolement, la perte d’emploi/de revenus, la consommation nocive d’alcool, des antécédents familiaux de suicides, des douleurs chroniques, du désespoir ainsi que des troubles psychiatriques comme la dépression sont parmi les principaux facteurs de risques.

Tous concernés

Depuis 45 ans, le taux de suicide a augmenté de 60% à l’échelle mondiale. Toutes les régions du monde sont concernées, même si 79% des suicides ont eu lieu dans les pays à faibles revenus ou intermédiaires en 2016. 39% des suicides surviennent notamment dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires d’Asie du Sud-Est. Un quart des suicides surviennent en Inde et en Chine, la Chine comprenant au moins 20% des suicides mondiaux.

Cas particulier de la France

La France est l’un des pays en Europe à posséder l’un des taux les plus élevés : deux fois plus qu’en Italie ou qu’en Espagne.

Le suicide est évitable

Pour les éviter, les pays doivent se doter d’une stratégie multi-sectorielle globale de prévention du suicide. Seuls 38 pays sont aujourd’hui dotés d’une stratégie ou d’un plan d’actions national en la matière. 

L’objectif aujourd’hui à l’échelle mondiale est de réduire de 10% le taux de suicide dans le monde d’ici 2020, chiffre pas inatteignable puisque le taux de suicide standardisé selon l’âge avait baissé de 26% entre 2000 et 2012. Dans le Plan d’action global pour la santé mentale 2013-2020, les États Membres de l’OMS s’engagent à œuvrer pour atteindre ce chiffre. La prévention du suicide compte parmi les priorités du Programme d’action de l’OMS Combler les lacunes en santé mentale, lancé en 2008, lequel fournit également des orientations techniques.

Trois types de stratégies existent et se complètent pour contrecarrer les facteurs de risque :

  • Les stratégies de prévention « universelles » sont destinées à l’ensemble de la population, visant à faciliter l’accès aux soins, promouvoir la santé mentale, réduire la consommation excessive d’alcool, limiter l’accès aux moyens de suicide (médicaments, armes à feux, pesticides) et encourager les médias à appliquer des pratiques responsables de couverture du suicide (ni l’encourager ni le considérer comme sensationnel/spectaculaire).
  • Les stratégies de prévention « sélectives » ciblent des groupes vulnérables en fonction de caractéristiques (âge, sexe, statut professionnel, antécédents familiaux) : victimes de traumatismes ou d’abus, personnes confrontées à des conflits ou catastrophes naturelles, réfugiés ou migrants, et personnes endeuillées par un suicide. Cela consiste à former des « sentinelles », chargées d’accompagner ces personnes et de proposer des services comme des lignes téléphoniques d’assistance.
  • Les stratégies « indiquées » s’adressent à des personnes vulnérables spécifiques ( celles ayant montré des signes ou déjà effectué des tentatives) sous forme de soutien communautaire, suivi suite à une hospitalisation, sensibilisation et formation des professionnels de santé, identification et prise en charge accrues des troubles mentaux et liés à la consommation de substances psycho-actives.

Enfin, parallèlement à la dépénalisation ; la prévention (à travers la prise en charge des tentatives de suicides, le fait d’éviter les récidives, de combattre l’isolement, de dépister et traiter les dépressions ainsi que de limiter l’accès aux moyens létaux) ainsi que l’absence de stigmatisation autour du suicide demeurent essentiels afin que ce phénomène de société – également priorité de santé publique – soit pris à bras le corps et évité. Comme l’affirmait le philosophe Paul Ricoeur – endeuillé par son fils Olivier qui s’était suicidé en 1986, le suicide ; c’est le meurtre de l’autre.

SOURCES :

Le Monde (voir ici)

France Info (voir ici)

OMS (données/statistiques ici et rapport téléchargeable de 2014 )

Centre de prévention du suicide

OCDE ( données consultables sur le suicide)

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