Alors que le monde avait, ces jours-ci, les yeux tournés vers le Royaume Uni qui accompagnait sa souveraine dans sa dernière demeure, la France commençait à sortir de la torpeur estivale pour débattre du sujet des retraites. Le Parlement n’a pas repris ses travaux mais chacun affûte ses arguments autour de ce thème toujours explosif. Une chose est sûre : Emmanuel Macron semble déterminé à engager cette réforme laissée de côté au mitan de son premier mandat, en raison de la crise sanitaire. Rien ne dit pour autant qu’il puisse la boucler tellement les résistances sont nombreuses.
De quelle réforme s’agit-il ? Les contours ont évolué. La réforme systémique, qui consistait à regrouper la quarantaine de régimes qui prévalent en France en un seul, pour plus d’égalité, paraît abandonnée. Reste la réforme paramétrique, plus traditionnelle. Dans ce cas, de deux chose l’une : ou bien le pouvoir exécutif décide de repousser l’âge légal de départ à la retraite à 64 ou 65 ans, contre 62 aujourd’hui ; ou bien, il allonge progressivement la durée de cotisation. Une formule, qui mixte les deux options, reste possible, mais la voie la plus efficace est sans conteste le report de l’âge légal.
Certains, y compris dans la majorité présidentielle, estiment que la période n’est pas favorable à cette réforme car les nuages s’amoncellent à l’horizon : inflation, tensions internationales, crise énergétique… Faut-il rappeler que la dernière réforme des retraites a été votée en 2010 en pleine crise financière ? L’argument n’est donc pas valable à 100%.
Quant à la méthode, elle n’est pas encore arrêtée, mais elle est au centre d’une grande controverse. On prête au président de la République l’intention, via le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) examiné à l’automne, d’agir par le biais d’un simple amendement gouvernemental. L’hypothèse provoque de vives réactions parmi les oppositions, comme dans la majorité. François Bayrou lui-même s’est dit « opposé au passage en force », y voyant le risque « d’abord de coaliser les oppositions entre elles, puis de diviser la société française ». Et pour cause : toutes les dernières réformes des retraites ont fait l’objet d’un projet de loi spécifique. Ce fut notamment le cas en 1993, sous François Mitterrand, en 2003, sous Jacques Chirac, en 2010, sous Nicolas Sarkozy, et en 2013, sous François Hollande. Le chef de l’État lui-même avait entamé le même processus lors de son premier quinquennat.
Alors, pourquoi éviter cette fois-ci la voix « classique » ? Cela permettrait d’aller vite et de court-circuiter toutes les obstructions parlementaires. Mais le temps gagné dans ces conditions pourrait être perdu en raison d’une forte agitation dans la rue. A suivre…