Etats-Unis : le pays plongé dans une crise sociale

Le lundi 27 mai 2020, Georges Floyd, un Afro-américain de 46 ans est décédé après avoir été arrêté par la police de Minneapolis.  Depuis, une vague de contestation sociale a émergé au sein de la première puissance mondiale. Des centaines de personnes se sont rassemblées le week-end dernier dans de nombreuses villes américaines (Los Angeles, Seattle, New-York, Atlanta, etc.) pour protester contre les violences policières. Des violentes émeutes se sont déroulées , faisant de nombreux dégâts matériels : plusieurs commerces ont été incendiés, des pillages et de nombreuses dégradations ont eu lieu.[1]

L’équipe de l’ASFE a pu s’entretenir avec Franck Bondrille, Conseiller consulaire pour la circonscription de Miami, et Gérard Michon, Conseiller consulaire pour la circonscription de Los Angeles, afin d’en savoir davantage.

Quelle est la situation actuelle à Miami ?

F.B. : La situation a Miami est identique au reste du pays : des manifestations de contestation se forment chaque jour et nous craignons une montée de la violence.

Comment expliquez-vous cet élan de révolte populaire qui s’abat sur tout le pays ?

F.B. : Cet élan de révolte et de contestation s’est exprimé de façon majoritairement pacifique le jour, mais certaines manifestations ont débordé et ont donné lieu à des scènes de violences et pillages. Après plusieurs décès dus à des arrestations et violences policières, il fallait s’attendre un mouvement de ras- le-bol.

Quelles sont les mesures sécuritaires mises en place par le gouvernement américain afin d’éviter tout débordement (couvre-feu, déploiement de la garde nationale, etc.) ?

F.B. : Le Gouvernement a réagi avec une réponse sécuritaire d’ampleur qui s’est accompagnée du recours à des véhicules blindés de transport de troupes, de l’utilisation de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc et le déploiement de la garde nationale.

La police a instauré  un couvre feu de 20 h à 6 h du matin pendant une semaine et si cela se poursuit Donald Trump a annoncé qu’il pourrait avoir recours a l’armée.

La mort de Georges Floyd n’est-elle pas finalement la partie visible de l’iceberg d’un malaise social bien plus important ?

F.B. : Nous sommes dans un contexte de frustrations accumulées depuis la création du mouvement Black Lives Matter en 2013 avec de nombreuses violences. Je pense que  cela s’est amplifié car à la suite de ces 2 mois de confinement nous rentrons dans une crise sociale avec des chiffres du chômage inquiétant et de nombreuse faillites.

A quelques mois des élections présidentielles américaines, ces vagues de colère contre le racisme et les bavures policières peuvent-elles être rédhibitoires pour Donald Trump ?

F.B. : C’est difficile de dire cela aujourd’hui mais Donald Trump cherche une réponse face à cette colère. Car il sait que ces événements pourraient influer grandement la campagne présidentielle, à cinq mois seulement de l’élection.

Dans les quelques 100 000 victimes de l’épidémie de Covid-19 aux Etats-Unis, les Afro-Américains ont été deux fois et demie à trois fois plus nombreux à mourir du virus que les membres des communautés blanche, latino et asiatique[2]. Comment la presse américaine explique-t-elle cela ? Est-ce un des facteurs de la crise actuelle ?

F.B. : Les Noirs américains concentrent plus de facteurs de comorbidité, comme le diabète et l’obésité, que les autres, parce qu’ils concentrent aussi plus de pauvreté. Pour des raisons financières, ils ne peuvent aller à l’hôpital. C’est la réalité criante des inégalités. Le président Trump ne peut plus aujourd’hui l’ignorer.

G.M. : A Los Angeles comme ailleurs aux Etats-Unis, les manifestations ont pris diverses formes: bris de devantures, blocage d’autoroutes par des piétons. Ceci sur fond d’une urgence sanitaire qui se prolonge. Les images fortes du meurtre de George Floyd ont embrasé les esprits parce qu’il existe un malaise profond dans la communauté noire qui se sent victime de racisme et particulièrement maltraitée par les forces de l’ordre. Les insultes racistes « anti-blancs » sont devenues monnaie courante sur les réseaux sociaux. Plus d’un demi-siècle après la fin officielle du racisme d’Etat aux Etats-Unis et malgré les mesure dites « affirmative action » tendant à compenser certaines communautés pour les oppressions passées, celles-ci restent dans une situation économique précaire. Cette situation est reflétée par de nombreux indicateurs, dont les pourcentages d’incarcération et la plus grande susceptibilité sanitaire face à la pandémie actuelle. Tant que ceci restera le cas, toute étincelle médiatique embrasera la poudrière du ressentiment à l’égard des mieux-logés.

[1] https://www.lemonde.fr/international/article/2020/05/30/nouvelle-nuit-de-colere-et-d-emeutes-aux-etats-unis-apres-la-mort-de-george-floyd_6041293_3210.html
[2] https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/05/30/etats-unis-aux-sources-de-l-embrasement_6041274_3232.html

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