Les débats vont bon train à l’heure où se rapproche l’élection de la prochaine Secrétaire Générale de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Deux noms circulent dans les couloirs du sommet organisé du 11 au 12 octobre à Erevan, capitale arménienne : la Secrétaire générale sortante Michaëlle Jean, 61 ans, réfugiée sur le territoire canadien à 11 ans, née en Haïti – ancienne journaliste et gouverneure générale du Canada – se représente pour briguer un second mandat à la tête de l’OIF ; face à Louise Mushikiwabo, 57 ans, actuelle ministre des Affaires étrangères au Rwanda, proche de M. Kagamé réélu en 2017 avec 97% des voix.
L’actuelle ministre des affaires étrangères du Rwanda a bénéficié du soutien de l’Union Africaine et du Président français Emmanuel Macron en mai dernier, désireux d’améliorer les relations diplomatiques entre la France et le Rwanda.
Dans un entretien accordé au journal Le Monde, Louise Mushikiwabo indique avoir pour objectif, si elle est élue, de donner plus de visibilité à l’OIF, de mettre la jeunesse au cœur de son action, à travers l’amélioration de l’accès à l’emploi ou encore l’échange de bonnes pratiques.
L’OIF : instrument de rayonnement de la langue française ou outil d’un multilatéralisme fort ? Ces deux conceptions évoquées tour à tour par le Président français, Louise Mushikiwabo ou encore Michäelle Jean s’opposent littéralement. Ainsi la désignation de la prochaine Secrétaire Générale risque d’influencer la politique conduite par l’OIF et se révèle être hautement stratégique.
La France – qui a supprimé récemment 60 millions d’euros de son programme » Diplomatie culturelle et influence » et baissé de 11% les subventions des Alliances Françaises – aurait pour ambition de reprendre pieds dans la région des Grands Lacs et voudrait accélérer le processus de réconciliation avec Kigali, selon Kako Nubukpo, économiste anciennement à l’OIF.
Louise Mushikiwabo est certes favorite mais cette décision du président français d’appuyer la candidature de cette ministre rwandaise est loin de remporter l’adhésion de l’ensemble des habitants de l’Hexagone. En effet, dans une tribune parue dans Le Monde intitulée « Louise Mushikiwabo n’a pas sa place à la tête de la francophonie » Charles Josselin, Pierre-André Wiltzer, Hélène Conway-Mouret et André Vallini, anciens ministres Français chargés de la francophonie, indiquent que cette décision qualifiée d’unilatérale porterait atteinte à l’image de notre pays. En cause : le manque de concertation avec nos principaux partenaires de l’OIF, le bras de fer inutile avec Justin Trudeau tandis que son pays est parmi les plus importants contributeurs au financement de l’OIF, l’absence de réflexion collective sur l’avenir et perspectives de la Francophonie.
L’OIF a pour mission de promouvoir l’enseignement du Français, soutenir les démocraties et renforcer les droits de l’homme. Or la candidature rwandaise, après l’adhésion de ce pays au Commonwealth, la fin de l’enseignement du français dans les écoles, le choix de l’anglais comme langue nationale, la rédaction de tous les actes officiels en anglais…ne semble pas la mieux placée pour devenir porte-parole de la langue de Molière, cinquième langue la plus parlée au monde avec 300 millions de locuteurs.