Chères élues, chers élus,
Les élections italiennes ont été une nouvelle fois la manifestation du séisme qui secoue l’Europe depuis plusieurs années et qui voit notre continent traversé de tout son long par un vent de révolte populaire – populiste, diront certains – qui balaie les partis traditionnels et remet en cause le clivage gauche-droite.
L’euroscepticisme, pour ne pas dire l’europhobie, est l’une des explications de cette révolte politique qui s’exprime dans les pays d’Europe centrale –comme la Hongrie, la Pologne, ou la Tchéquie- mais aussi dans les pays fondateurs de l’Union Européenne comme la France avec le Front national, l’Allemagne avec l’AFD ou l’Italie avec la Ligue du nord et, dans une moindre mesure, le Mouvement 5 étoiles. Sans parler de la Grande Bretagne, qui a clairement fait le choix de sortir de l’Union Européenne par référendum. Ce tsunami est engendré, d’après moi, par deux causes principales tant à l’est qu’à l’ouest du Vieux-Continent.
D’abord, il y a cette crainte que l’Europe telle qu’elle se construit ne conduise à la disparition des identités et des souverainetés nationales. Ce sentiment, partagé par de nombreux électeurs un peu partout, est renforcé par la peur que les flux migratoires issus d’outre Méditerranée ne deviennent incontrôlables et finissent par menacer nos cultures et nos traditions occidentales. Un politologue bulgare, Ivan Krastev, remarquait récemment que la vague migratoire de 2015 avait été une sorte de 11 septembre pour l’Europe, en référence aux attentats de 2001 aux Etats-Unis. Même si comparaison n’est pas raison, il est sûr que cet épisode a profondément ébranlé le continent.
J’observe aussi que dans tous ces pays une fracture de plus en plus grande divise les nations elles-mêmes entre, d’un côté, le monde des villes, celui des grandes agglomérations et, de l’autre, celui des campagnes et des milieux ruraux. Le premier se sent pleinement impliqué dans la globalisation alors que le second se pense, au contraire, abandonné et relégué loin des centres de décisions et manifeste sa colère par un vote hostile au modèle multiculturel européen ouvert aux quatre vents de la mondialisation.
Il faut impérativement que les responsables politiques, dont je suis, entendent cette colère et y répondent par des solutions fermes et réalistes. Sans quoi les démagogues de tout poil trouveront devant eux un large boulevard électoral. Il y va de l’avenir de l’Europe et de celui des pays qui la composent.
Jean-Pierre Bansard