Une abstention record : prédiction ou réalité ?
Au dernier scrutin des européennes, en 2014, 3 jeunes de 18 à 24 ans sur 4 n’ont pas voté, soit 74% d’entre eux. La prédiction pour l’année 2019 en vue des européennes de dimanche prochain est que cette abstention pourrait s’élever selon des estimations IFOP à près de 77% d’entre eux. Seuls 23 % des jeunes iraient voter soit moins d’un jeune sur quatre, contre 42,5% à l’échelle de l’ensemble des Français.
Enquête réalisée par l’IFOP et Les Jeunes Européens
En avril dernier, seuls 58% des jeunes de 18 à 25 ans savaient que les élections européennes se tenaient en mai. 32% d’entre eux déclaraient s’intéresser à la campagne.
Pour ceux qui voteront, ils ont déclaré le faire en fonction d’enjeux européens (54%), moins en fonction de la politique intérieure que de la volonté d’exprimer un mécontentement face à la manière dont l’UE est dirigée (50%).
Comprendre les causes de ce désamour des jeunes à l’égard de l’UE
L’abstention serait due à un pessimisme autour de la capacité de cette élection à amorcer un quelconque changement mais aussi un manque d’identification.
Cette année, la moyenne d’âge des principaux têtes de listes a pourtant été revue à la baisse, en passant de 54 à 43 ans : Manon Aubry (LFI) 29 ans, Jordan Bardella (RN) 23, François Xavier-Bellamy (LR) 33, Ian Brossat (PCF) et Raphaël Glucksmann (Place publique-PS) tous les deux âgés de 39 ans. La liste « Allons enfants » portée par une Sciences Po de 22 ans, Sophie Caillaud, est même uniquement constituée de jeunes de moins de 30 ans, désireux de porter la voix de la jeunesse au Parlement européen et de développer, entre autres, le programme Erasmus.
Alors que 13% des jeunes en ont bénéficié, 56% ont effectué un voyage scolaire dans l’un des pays européens, 10% ont eu accés au volontariat de solidarité internationale, tous ne se sentent pas concernés par les enjeux européens ou ne sont pas persuadés du bienfondé de l’action européenne sur certains sujets qu’ils considèrent comme prioritaires : le réchauffement climatique, le chômage, l’emploi, la santé. 71% des jeunes font ainsi plus confiance aux institutions nationales qu’en celles de l’Europe. Méconnaissance de l’idée d’UE, défiance envers ces institutions pour répondre aux grands enjeux mondiaux, absence de réponse tranchée quant aux questions de politique étrangère, de défense et d’immigration… La désaffection des jeunes générations pour la politique peut également s’expliquer par l’effondrement des idéologies et les scandales de corruption autour du paysage politique. Le politique est surtout un élément moins structurant comparé aux anciennes générations dont celle de mai 68.
Voter pour ?
En termes d’intentions de vote, parmi les listes qui remporteraient les voix des jeunes, on compte à égalité LREM et le RN (19%) mais aussi EELV (16%) et le PCF (12%), preuve que la jeunesse conserve un tropisme de gauche. Leur forte mobilisation à l’appel de Greta Thunberg pour marcher en faveur d’une meilleure application de l’accord de Paris adopté lors de la COP 21 est aussi le reflet du fait qu’ils sont davantage sensibilisés sur l’écologie.
De nouveaux moyens déployés pour mobiliser les jeunes européens
Parmi les résultats de l’enquête, il ressort également que ces jeunes ont le sentiment d’être mal informés pour 69% d’entre eux (dont 17% « très mal informés »). C’est pourquoi plusieurs initiatives ont été développées dans le but de reconquérir cet électorat de jeunes, leur rendre le fonctionnement de l’UE plus lisible, les programmes plus faciles à déchiffrer, expliquer le fonctionnement de l’UE et ses missions de manière pédagogique.
Parmi celles-ci, on note le super-héros Captain Europe qui amuse sur les réseaux sociaux ; Rock the Eurovote – une dizaine de dessins-animés de 30 secondes pour expliquer les enjeux de l’Europe aux jeunes ; Vote&Vous– inspiré de Tinder pour faire le tri entre différentes propositions et découvrir avec quel parti on « match » le plus ou encore l’outil la Boussole européenne du CEVIPOF pour identifier également de quelles tendances politiques nos idées se rapprochent. En février, le Forum Français de la Jeunesse a aussi lancé le site Bouscule La Politique, plate-forme participative permettant d’émettre des propositions aux partis en lice.
A n’en pas douter, les jeunes sont l’avenir et font figure de principales cibles du prochain scrutin, auquel on ne peut espérer qu’ils donnent tort aux enquêtes d’opinions, connaissent un regain de mobilisation et fassent preuve d’une volonté de s’exprimer. Une forte majorité d’entre eux serait d’ailleurs en faveur de la reconnaissance du vote blanc.
SOURCES :
Libération (voir ici)
TV5 Monde (voir ici)
Le Monde (voir ici)