Jean-Luc Ruelle, nouveau sénateur des Français de l’Etranger 

À l’issue des élections sénatoriales des 16 et 24 septembre derniers, la liste ASFE 2023 réalise le meilleur score avec 102 voix, obtenant ainsi deux sièges. L’Alliance Solidaire des Français de l’Etranger compte désormais trois sénateurs : Jean-Pierre Bansard, Evelyne Renaud Garabedian et un nouvel entrant : Jean-Luc Ruelle, actuel Conseiller des Français de l’étranger en Côte d’Ivoire. Rencontre avec ce nouveau sénateur plein de projets.     

Vous êtes devenu dimanche soir sénateur représentant les Français établis hors de France. Pour ceux qui ne vous connaitraient pas encore, pouvez-vous revenir brièvement sur votre parcours ?  

C’est un parcours très classique de Français à l’étranger. Je travaillais dans un groupe international et je suis arrivé il y a quelques dizaines d’années en Côte d’Ivoire où j’ai décidé de m’installer avec ma famille. J’y ai développé des activités libérales ainsi que d’autres activités. J’ai notamment contribué au développement de la société KPMG en Afrique francophone subsaharienne.
 
Depuis quelques mois, j’ai mis un terme à mes responsabilités à la tête de KPMG en ayant, je crois, réussi ma mission puisque nous avons désormais 16 ou 17 bureaux dans autant de pays et entre 700 et 800 collaborateurs dans cette zone. 

Votre liste ASFE est arrivée en première position devançant celles du parti Les Républicains, menée par Ronan Le Gleut, et d’Europe Écologie Les Verts, menée par Mathilde Ollivier. Quelle est votre réaction à votre propre élection et que ressentez-vous ? 

Je ressens de la joie face à ce nouveau défi. On ne peut pas tout faire, il va donc falloir hiérarchiser les choses afin de mener des projets qui aboutissent. En politique, il y a souvent beaucoup de projets qui n’arrivent pas au bout, faute d’intérêt ou parce qu’on s’éloigne des échéances électorales. Il faut donc bien identifier les projets, pas trop nombreux, sur lesquels on peut être efficace et performant. Comme il y en a un certain nombre, le principal défi sera de sélectionner les sujets sur lesquels je vais travailler.   

Cette victoire est-elle une surprise pour vous ? 

Depuis que j’ai rejoint l’Alliance Solidaire aux côtés de Jean-Pierre Bansard et d’Evelyne Renaud-Garabedian, j’ai appris à apprécier leurs forces et l’efficacité de leur organisation complètement dédiée à la défense des intérêts des Français de l’étranger. En étant en deuxième position sur la liste d’Evelyne Renaud-Garabedian, je savais que l’élection n’était pas acquise. Mais le travail très professionnel réalisé par les équipes de l’ASFE pouvait nous donner un espoir sérieux de réussite.      

« Ces résultats représentent un discrédit complet des partis traditionnels »

Comment analysez-vous les résultats de ces élections ? 

Si j’analyse, sur le fond, les orientations des électeurs, ces résultats représentent un discrédit complet des partis traditionnels, qu’il s’agisse des représentants des Français établis hors de France ou des autres. Un discrédit qui est encore plus accentué à l’étranger, dans nos pays. 

Ces partis introduisent des clivages chez nos électeurs, liés à des problématiques hexagonales dont les Français de l’étranger n’ont que faire. Même si beaucoup d’électeurs restent attachés à leur parti d’origine, force est de constater que le score réalisé par le Parti socialiste par exemple ou celui des Républicains, n’est pas très brillant. Il y a donc une forme de désengagement vis-à-vis de ces partis traditionnels. Cela a toujours été mon discours, mais pour moi, ces partis et leurs clivages n’ont pas leur place parmi les Français de l’étranger.  

Les préoccupations quotidiennes des Français de l’étranger sont très éloignées des considérations politiciennes des partis traditionnels et des polémiques stériles. C’est cette ligne que l’ASFE a toujours prônée depuis sa création. La force de l’ASFE est sa nature transpartisane, avec pour intérêt premier la défense exclusive des intérêts des Français de l’étranger.  

Il convient de constater que de nombreux conseillers et délégués, qui ont voté le dimanche 24 septembre, ont démontré une adhésion claire et franche à cette vision. En nous renouvelant leur confiance et en permettant à l’ASFE de compter à ce jour trois sénateurs, les conseillers et délégués ont fait de nous la première force au service des Français de l’étranger.   

J’espère pouvoir poursuivre ce travail avec l’ensemble des élus, y compris avec ceux qui n’ont pas porté leur voix sur notre liste. Ce qui nous rassemble est beaucoup plus fort et plus grand que ce qui nous oppose. Nous devons poursuivre la dynamique, tant les défis à relever pour les Français de l’étranger sont importants.   

Quelles seront les priorités de votre mandat ? 

La priorité de mon mandat s’inscrit dans la continuité de ma mission de Conseiller des Français de l’étranger, à savoir leur apporter un soutien et défendre leurs intérêts, avec, naturellement, un certain prisme africain. Je connais bien ce continent, notamment les problématiques que rencontre la communauté française ainsi que les défis actuels et nouveaux.   

Il convient vraiment de poser un regard particulier sur le continent africain, car il est décisif pour le monde entier. Du point de vue démographique, l’Afrique compte 2,5 milliards d’habitants et 5 milliards en 2050.  

Les relations de coopération entre la France et certains pays africains sont décriées et rejetées avec vigueur depuis quelques années. En effet, les cas du Mali, du Burkina Faso et plus récemment du Niger sont éloquents. Les questions de la problématique sécuritaire, du maintien de la communauté française en Afrique et de l’avenir de notre pays sur le continent africain se posent.  

Nous avons donc une responsabilité au regard de la communauté française qui y est établie et un impératif à instaurer une coopération fondée sur de nouvelles bases, afin de trouver une nouvelle forme de relations stables et durables. Mais bien évidemment, je m’intéresserai aussi aux autres pays du monde et à tous les Français où qu’ils soient. 

Il y a énormément de sujets d’importance, comme les entrepreneurs Français à l’étranger (EFE) par exemple, dont on parle beaucoup en ce moment et qui doivent permettre de contribuer au redressement du commerce extérieur français. Tout ce qui touche à l’influence française passe aussi par la réanimation et la connaissance de notre réseau d’EFE.   

J’entends ainsi durant mon mandat mener un travail co-construit avec les Conseillers des Français de l’étranger et délégués consulaires en général et en Afrique en particulier, parce qu’ils sont les partenaires des populations locales et qu’ils ont accès à des informations de terrain. Ils constituent des « capteurs » majeurs pour les acteurs étatiques français, notamment ceux liés à la diplomatie et aux affaires étrangères.  

Quel message souhaitez-vous adresser aux élus des Français de l’étranger ? 

Je voudrais dire aux élus que la confiance qu’ils m’ont accordée m’honore et m’oblige dans le cadre de mon mandat de sénateur à œuvrer pour consolider la reconnaissance de leur engagement au service de la communauté.   

J’étais jusqu’à ce jour Conseiller des Français de l’étranger en Côte d’Ivoire et je sais combien ce travail collaboratif est indispensable pour nourrir le travail législatif et faire voter des lois susceptibles d’apporter des solutions aux problématiques majeures rencontrées par la communauté française établie hors de France.  

Les Conseillers des Français de l’étranger sont des acteurs de terrains dévoués à la communauté, ayant une bonne compréhension des réalités et des mutations qui s’opèrent au sein des différents pays. Il existe à cet égard une complémentarité entre leurs actions sur le terrain et le mandat exercé par les parlementaires. Il me parait donc indispensable de m’appuyer sur le réseau d’élus, dans un esprit transpartisan.  

Il est important que les Conseillers des Français de l’étranger et les Délégués investissent les instances de décision telles que le Parlement. Je suis l’exemple d’un Conseiller des Français de l’étranger devenu Conseiller à l’Assemblée des Français de l’Étranger, élu aujourd’hui sénateur. Chacun d’entre nous peut accomplir ce parcours très riche et porter la parole du terrain, afin de consolider la légitimité des élus. 

      

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