Valérie Villière, conseillère des Français de l’étranger en Australie, revient sur les événements tragiques survenus à Sydney le 14 décembre, et partage un témoignage de solidarité et de courage au nom de la communauté française.
Que s’est-il passé dimanche 14 décembre à Sydney ?
Dimanche 14 décembre, la communauté juive de Sydney, principalement installée dans les Eastern Suburbs, s’était réunie sur l’esplanade nord de la plage de Bondi pour célébrer le premier jour de Hanouka. Alors qu’environ 1 000 personnes, dont de nombreuses familles, étaient rassemblées, deux hommes armés de mitraillettes ont ouvert le feu sur la foule. Le bilan est extrêmement lourd : 15 personnes ont été tuées, âgées de 10 à 80 ans, et une quarantaine ont été blessées, parmi lesquelles des policiers présents sur les lieux. Ainsi qu’un jeune ingénieur français âgé de 27 ans, Dan Elkayam. Nous pensons fortement à sa famille.
Les deux assaillants étaient un père et son fils. Le père a été abattu par la police lors de l’intervention. Le fils, grièvement blessé, est actuellement hospitalisé sous garde à vue.
Comment ont réagi les dirigeants australiens ?
Les dirigeants de l’État de Nouvelle-Galles du Sud, ainsi que les autorités fédérales – le Premier de l’État et le Premier ministre australien – ont condamné fermement cet acte et exprimé leur solidarité avec les victimes.
Les enquêtes sont toujours en cours. À ce stade, il est difficile de qualifier juridiquement les faits d’acte terroriste, car aucun lien formel avec une organisation terroriste n’a été établi.
En revanche, le caractère antisémite de l’attaque ne fait aucun doute.
Il a également été indiqué que l’un des assaillants avait récemment perdu son emploi, ce qui laisse envisager la piste d’un acte motivé par une volonté de vengeance personnelle, sans que cela n’enlève rien à la gravité des faits.
Est-ce la première attaque antisémite en Australie ?
Non. Des actes antisémites ont été recensés ces dernières années, notamment à la suite des événements survenus après la prise d’otages d’Israéliens en octobre 2023. Cependant, jamais auparavant ces actes n’avaient été meurtriers.
La société australienne s’est progressivement polarisée en raison des tensions liées au conflit au Moyen-Orient, et l’on observe une augmentation des manifestations et incidents à caractère communautaire. Mais cette attaque marque un changement de nature et d’ampleur.
Comment la société australienne vit-elle cette attaque ?
La population est profondément choquée. Beaucoup font le parallèle avec le massacre de Port Arthur en 1996, qui avait conduit à une réforme majeure du contrôle des armes à feu, notamment une restriction drastique de l’accès aux armes à répétition.
À la suite de cette attaque, les dirigeants australiens ont annoncé leur intention de réexaminer la législation actuelle sur les armes, afin de renforcer encore les contrôles.
Les Australiens avaient le sentiment d’être protégés par leur éloignement géographique. Aujourd’hui, cette certitude s’est effondrée : la menace n’a plus de frontières. À l’approche de Noël, période traditionnellement associée à la paix et à l’innocence, beaucoup expriment un sentiment de vulnérabilité inédit.
Avez-vous un message à ajouter ?
Nos pensées vont avant tout aux familles des victimes, et tout particulièrement à celle de notre compatriote français. Face à cette tragédie, toutes les communautés se sont rassemblées pour tenter de surmonter cette épreuve collective.
Je souhaite également rendre hommage aux héros anonymes qui ont risqué leur vie sans se soucier de l’origine, de la religion ou des convictions des autres. Parmi eux, Ahmed El Ahmed, qui est parvenu à désarmer le plus jeune des assaillants après avoir reçu deux balles. Au 15 décembre, il se trouvait encore en chirurgie à l’hôpital.
Ce sont ces gestes de courage et de solidarité qui permettent à une société de rester debout face à la barbarie.
