Vingt ans de la loi Handicap : un bilan contrasté

À l’occasion du vingtième anniversaire de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap, dite « loi Handicap », la commission des affaires sociales du Sénat a publié un rapport d’information dressant un « bilan en demi-teinte » de cette législation. L’équipe de l’ASFE revient sur ses principales conclusions.

Droit à compensation : des avancées notables mais insuffisantes

La prestation de compensation du handicap (PCH), conçue pour garantir une prise en charge individualisée des conséquences du handicap, a vu ses critères d’éligibilité s’assouplir (2008, 2020, 2023) et son champ d’application élargi (2021, 2023). Toutefois, certains objectifs initiaux restent inachevés :

  • Une complexité excessive du droit à compensation pour les enfants ;
  • Un reste à charge encore trop élevé pour certains bénéficiaires ;
  • L’absence de revalorisation des aides techniques innovantes depuis 2006.

Niveau de vie des personnes en situation de handicap : une protection incomplète

Le rapport souligne que la loi de 2005 n’a introduit que peu de mesures spécifiques pour améliorer le niveau de vie des personnes handicapées. Si elle permet le cumul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) avec des revenus d’activité, elle crée deux compléments non cumulables : le complément de ressources (CR) – supprimé en 2019 – et la majoration pour la vie autonome (MVA).

Malgré ces dispositifs, le handicap demeure un facteur de précarité :

  • 57,1 % des personnes en situation de handicap vivent dans un ménage modeste contre 37,9 % des personnes sans handicap ;
  • Le montant maximal de l’AAH (1 016,05 euros) reste inférieur au seuil de pauvreté (1 216 euros).

Offre médico-sociale : des services en mutation mais encore inadaptés

La loi Handicap prévoit l’orientation des personnes en situation de handicap vers des établissements et services spécialisés. Toutefois, plusieurs limites persistent :

  • Des délais d’attente excessifs dans certains territoires en raison d’un manque de places et de services à domicile ;
  • Une segmentation trop poussée des parcours de soins selon le type de handicap, l’âge ou le mode d’accompagnement.

En parallèle, plusieurs engagements ont été pris :

Maisons départementales des personnes handicapées : des avancées mais des efforts à poursuivre

Créées en 2005 pour simplifier les démarches et personnaliser l’accompagnement, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) sont globalement bien perçues, avec 68,8% d’usagers satisfaits. Présentes sur tout le territoire (104 structures), elles centralisent les droits et prestations pour près de 5,9 millions de personnes.

Cependant, des améliorations sont nécessaires :

  • Un formulaire administratif jugé trop complexe et des notifications de droit souvent incompréhensibles ;
  • Une hausse des demandes couplée à un manque de personnel, allongeant les délais de traitement (4,5 mois en moyenne) et affectant la qualité de l’évaluation des besoins.

Emploi et insertion professionnelle : des avancées sur l’obligation d’emploi, mais des lacunes sur le maintien dans l’emploi

La politique d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH) a progressé grâce à une simplification du mode de calcul et son extension aux employeurs publics. Toutefois, des défis persistent:

  • Un taux de chômage des personnes en situation de handicap toujours deux fois plus élevé que la moyenne nationale ;
  • Une formation insuffisante : en 2023, seuls 29 % des travailleurs handicapés en emploi avaient un diplôme de niveau bac +2, contre 47 % dans la population générale ;
  • Un manque de sensibilisation aux ressources de formation adaptées, comme celles proposées par l’Agefiph.

Par ailleurs, les structures spécialisées continuent d’accompagner les travailleurs handicapés. La loi Handicap a modifié les modalités de rémunération des travailleurs en établissements et services d’aide par le travail (Ésat), favorisant ainsi un rapprochement progressif avec les droits du milieu ordinaire.

Pour conclure, vingt ans après son adoption, la loi Handicap a incontestablement permis des avancées majeures. Néanmoins, des inégalités persistantes appellent à des réformes complémentaires pour garantir une véritable égalité des chances aux personnes en situation de handicap. 

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