Ces dernières années, les procréations médicalement assistées (PMA) et les gestations pour autrui (PMA) pratiquées à l’étranger se sont multipliées. L’ASFE revient sur la reconnaissance de la filiation des enfants nés à l’étranger de ces différentes techniques d’assistance à la procréation.
Evolution jurisprudentielles et législatives
La pratique d’une PMA ou d’une GPA représente un sujet d’envergure pour le droit français. En effet, plusieurs notions juridiques, comme l’indisponibilité du corps humain ou la non-patrimonialité se sont opposées à certaines pratiques, et plus particulièrement à la GPA.
Ces litiges ont mené à de nombreuses interventions jurisprudentielles, qui ont mis en opposition les interdictions de retranscription de PMA et de GPA étrangères à des fondements du droit comme l’intérêt supérieur de l’enfant à lui établir une filiation française.
La CEDH est également intervenue de nombreuses fois à ce sujet, notamment avec l’arrêt du 26 juin 2014 Mennesson c/ France n°65192/11, qui met en priorité l’intérêt de l’enfant à l’interdiction de la GPA.
Toutes ces interventions-là ont créé une sorte de flou juridique, que la loi n°2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique est venue éclaircir. Celle-ci reprend principalement les différentes opinions de la jurisprudence, mais vient créer un statut légal de reconnaissance pour les enfants issus de PMA et de GPA.
Reconnaissance des enfants issus de PMA faites à l’étranger
La PMA est un procédé médical qui est déjà accepté en France, et ce depuis la loi n°94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain. Cependant, elle n’était pas ouverte à toutes les personnes : les couples composés de deux femmes, ainsi que les femmes célibataires ne pouvaient pas y recourir, ce qui expliquait la réalisation de nombreuses PMA à l’étranger.
La loi n°2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique modifie la loi sur la PMA en France et la rend désormais possible à toute personne, sans distinction de statut conjugal et sans distinction de sexe. De ce fait, les couples de femmes ainsi que les femmes seules peuvent désormais recourir à une PMA et voir leur filiation directement établie sur l’état civil de l’enfant né (à condition que la PMA et la filiation qui en résulte soit préalablement déclarée par acte notarié, au titre de l’article 342-9 du Code Civil).
Compte tenu de l’évolution de ce statut, les PMA réalisées à l’étranger deviennent également reconnues dans leur filiation. De ce fait, il faut faire retranscrire la naissance de l’enfant auprès des officiers d’état civil français, avec un délai de prescription de 3 années, ce qui permettra de reconnaitre la filiation présente dans l’acte, prenant en compte le parent biologique mais aussi le parent d’intention. Cette modalité de retranscription est prise en compte à l’article 342-12 du Code Civil.
N.B. : La loi n°2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l’adoption instaure à titre exceptionnel et provisoire (3 ans) un dispositif permettant – dans le cadre d’une procréation médicalement assistée (PMA) réalisée à l’étranger – à la femme qui n’a pas accouché d’adopter l’enfant « lorsque, sans motif légitime, la mère inscrite dans l’acte de naissance de l’enfant refuse la reconnaissance conjointe », sous réserve d’apporter la preuve du projet parental commun et de l’assistance médicale à la procréation (PMA) réalisée à l’étranger avant la promulgation de cette loi.
Reconnaissance partielle des enfants issus de GPA faites à l’étranger
La GPA est une méthode d’assistance à la procréation interdite en France. Beaucoup de décisions jurisprudentielles sont venues accorder aux parents d’enfants nés par GPA des moyens de reconnaissance de filiation, notamment par la reconnaissance partielle des états civils de naissance (la reconnaissance unique du parent biologique). La raison principale de ces reconnaissances était la considération de l’intérêt supérieur de l’enfant face aux législations d’interdiction des GPA.
La dernière décision en date de la Cour de cassation (Civ. 1re, 18 nov. 2020,) avait ainsi confirmé la possibilité d’une transcription totale de l’acte de naissance à l’égard des deux parents d’intention et avait évincé les conditions antérieures de transcription.
Cependant, la loi du 2 aout 2021 est revenue sur cette position : elle a modifié l’article 47 du Code Civil en précisant que « la réalité des faits qui sont déclarés dans l’acte de l’état civil étranger établissant ce mode de filiation est appréciée au regard de la loi française ».
Cette modification d’article signifie donc que la transcription des actes civils ne se basera que sur la réalité factuelle et sur les conditions légales françaises, qui ne reconnaissent donc pas la filiation directe d’un parent d’intention ayant eu recours à la GPA. Seul le parent biologique sera reconnu comme tel lors de la transcription partielle de l’état civil : l’autre parent – de nationalité française ou étrangère – doit alors obligatoirement passer par une adoption.
Obtention de la nationalité française pour les enfants de Français ayant eu recours à une technique d’assistance médicale à la procréation
Du fait de la loi du 2 août 2021, les modalités d’obtention de la nationalité française pour les enfants nés de GPA et de PMA à l’étranger ont évolué :
- Pour les PMA : étant donné que la retranscription de l’état civil de l’enfant se fait de manière complète, celui-ci est automatiquement reconnu comme étant de nationalité française, et ce à partir du moment où l’un de ses parents est français (parent biologique ou parent d’intention)
- Pour les GPA : l’obtention de la nationalité française pour un enfant né d’une GPA va particulièrement dépendre du parent français :
- Si le parent biologique est français, la transcription va automatiquement attribuer la nationalité française à l’enfant.
- Si le parent d’intention est français, il faudra passer par une procédure d’adoption plénière de l’enfant par le parent d’intention, afin qu’il puisse bénéficier de tous les droits du parent. Etant donné que la filiation du parent d’intention ne sera pas retranscrite, l’enfant ne pourra pas bénéficier des droits de nationalité de ce dernier. Après la confirmation de l’adoption plénière, l’enfant obtiendra alors la nationalité française.