Le traité du Quirinal : coopération bilatérale entre la France et l’Italie

Place Saint Pierre-Italie

Un traité de coopération bilatérale renforcée entre la France et l’Italie a été signé le 28 Novembre 2021. Ceci quelques semaines après le sommet du G20 qui s’est d’ailleurs tenu à Rome. 

Il s’inscrit dans le processus de consolidation des relations européennes voulues par la France depuis 2018. Après quelques tensions politiques entre les deux pays, l’arrivée de Mario Draghi à la tête du gouvernement italien a permis le rapprochement avec la France et a créé une dynamique permettant la signature de cet accord. 

Le dispositif est rare, car il n’existe qu’un seul autre accord de coopération bilatéral signé par la France, celui de l’Elysée, en 1963 avec l’Allemagne.

La qualité des relations franco-italiennes mais aussi les liens économiques, culturels, industriels, politiques, sociaux, universitaires… font de cet accord, la matérialisation d’une relation d’amitié historique et profonde. 

La coopération est déjà forte et effective, notamment de part la région transfrontalière alpine, et les enjeux communs de la zone de la Méditerranée mais l’objectif réside dans la mise en place d’un cadre et d’un « réflexe franco-italien » afin de structurer les relations bilatérales. 

Ce texte prévoit la mise en place de consultations bilatérales appuyées par des rencontres régulières. Afin de réaffirmer les valeurs partagées par les deux Etats et la volonté d’actions conjointes, le traité du Quirinal pose les bases d’un mécanisme de coopération et de consultation globale. 

L’accord se compose de 11 chapitres stratégiques à mettre en place pour les prochaines années. 

1 – AFFAIRES ÉTRANGÈRES 
  • Renforcer le multilatéralisme dans la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée, les violations des droits humains. Y compris la traite des êtres humains, les trafics illicites et la coopération dans le cyberespace. Ainsi que la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive 
  • Coordonner les politiques étrangères et promouvoir une politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne
  • Réformer les institutions multilatérales comme l’OMS ou l’OMC
  • Accroitre la coopération ; pour la stabilité de la Méditerranée, de l’Afrique Saharienne, du Moyen-Orient, du Golfe et de la région indopacifique 
  • Intensifier leur coopération en matière de développement durable dans le cadre de la présidence italienne du G20 en 2021
  • Renforcer les liens diplomatiques et favoriser la mobilité et les échanges entre les ministères italien et français des affaires étrangères. 
2 – SÉCURITÉ ET DÉFENSE
  • Mettre en place des consultations sur des sujets sécuritaires communs pour identifier des synergies possibles entre les deux pays
  • Créer un conseil franco-italien de défense et sécurité dans le cadre de rencontres régulières 
  • Approfondir la collaboration de nos entreprises stratégiques en matière d’industrie de défense de haut niveau 
  • Augmenter la coopération des forces armées tant au niveau du commandement, de la formation, du déploiement, de la prévention et des capacités opérationnelles
  • Développer une culture stratégique commune et une orientation partagée
  • Favoriser l’échange d’informations.
3 – AFFAIRES EUROPÉENNES
  • Défendre les valeurs fondamentales de l’Union Européenne et le projet européen
  • Promouvoir la citoyenneté européenne 
  • Favoriser le dialogue et l’éducation sur le sujets européens en promouvant des initiatives locales à destination de publics jeunes
  • Encourager les échanges et la mobilité intraeuropéenne des jeunes, ou des acteurs comme les  collectivités (jumelage)
  • Concourir à la sécurisation des processus électoraux et lutter contre la désinformation
  • Renforcer leur position commune pour une approche européenne des politiques  sur les sujets à forts enjeux : migrations, numérique, processus de paix au Proche-Orient, la Libye, le voisinage du Sud. 
4 – POLITIQUES MIGRATOIRES, JUSTICE ET AFFAIRES INTÉRIEURES
  • Coordination dans l’Espace Schengen des politiques migratoires, du droit d’asile, des flux migratoires pour les pays tiers d’origine et de transit
  • Dans le cadre du nouvel instrument d’action extérieure de l’Union Européenne (NDICI), mettre en place une Initiative Equipe Europe régionale pour la Méditerranée
  • Soutenir l’ONU dans les opérations d’assistances aux migrants et aux réfugiés ainsi que pour les procédures de retours volontaires avec les pays d’origine;
  • Développer une coopération structurée en matière de sécurité intérieure avec la création d’une unité opérationnelle et promouvoir des outils communs pour les enquêtes et des formations conjointes dédiées aux forces de l’ordre des deux pays
  • Renforcer la coopération juridique en matière pénitentiaire, de droit des mineurs, de délits environnementaux et de crime organisé
  • Accroitre la confiance mutuelle dans les deux systèmes judiciaires en s’appuyant sur la formation et les échanges de bonne pratiques.
5 – COOPÉRATION ÉCONOMIQUE, INDUSTRIELLE ET NUMÉRIQUE
  • Promouvoir un cadre économique européen fort et compétitif en participant aux débats sur l’avenir du Pacte de Solidarité et de croissance 
  • Encourager les secteurs économiques stratégiques post-covid en coordonnant les plans de relance
  • Rapprocher les tissus économiques et les industries avec les différents outils et programmes des pays respectifs comme la Caisse des dépôts et consignations, la Banque publique d’investissements 
  • Intensifier les échanges et la coopération des entreprises en zone transfrontalière
  • Accélérer la transition numérique souveraine étatique et européenne en soutenant les infrastructures technologiques et leur autonomie
  • Coopérer en matière de règles communes pour les contrats commerciaux.
6 – DÉVELOPPEMENT SOCIAL, DURABLE ET INCLUSIF
  • Respecter les objectifs de développement durable 
  • Renforcer la dimension sociale de l’Union Européenne notamment pour la mise en place de conditions de travail, de transparence salariale ou de rémunération minimale 
  • Soutenir les politiques pour l’égalité des sexes, l’accès aux femmes à des parcours de formation contre les stéréotypes de genre et lutter contre les violences machistes en particulier au sein des organisations multilatérales
  • Mettre en œuvre les accords de Paris et le Pacte Vert européen ainsi que les financements nécessaires face à l’urgence climatique pour une neutralité carbone et climatique
  • Soutenir l’économie circulaire, la recherche et le développement pour des solutions durables énergétiques, industrielles, agricoles, chimiques, technologiques, de transports pour entrainer une transition globale et écologique
  • Protéger la biodiversité, promouvoir l’accès à l’eau, à l’assainissement dans le cadre des différents accords multilatéraux. Ceci en particulier des Alpes, de la Méditerranée et les ressources naturelles en commun)
7 – ESPACE
  • Intensifier la coopération bilatérale dans le secteur du transport spatial entre les deux Etats 
  • Favoriser une industrie spatiale innovante en vue des suites des programmes européens Ariane et Véga 
  • Organiser des groupes de travail avec d’autres partenaires européens dans le cadre des activités liées au New Space
  • Renforcer les projets européens spatiaux dans le cadre de la souveraineté et de la politique de sécurité. Mais aussi de défense européenne et faire du Centre Spatial Guyanais la bande de lancement européenne
  • Poursuivre la coopération industrielle et institutionnelle pour l’innovation entre l’Italie et la France
  • Encourager la collaboration entre le Centre national d’études spatiales et l’Agence spatiale italienne
8 – ENSEIGNEMENT, FORMATION, RECHERCHE ET INNOVATION
  • Rapprocher les politiques d’éducation en matière d’application du Pacte vert et de la stratégie européenne pour l’éducation
  • Favoriser les doubles diplômes du baccalauréat français et de l’Esame di Stato italien (ESABAC), ceux issus de l’enseignement professionnel et technologique, et des apprentis
  • Accompagner le dynamisme de la mobilité entre les deux Etats des étudiants mais aussi du personnel
  • Développer les échanges et les formations des enseignants français et italiens
  • Encourager les politiques linguistiques de promotion du français et de l’italien 
  • Structurer et appuyer la recherche dans les secteurs d’avenir (santé, numérique, scientifique, chimie, océanographie, environnement, patrimoine, pôles etc)
  • Encourager les partenariats en matière de recherche et de développement d’excellence comme l’initiative européenne « Bluemed » pour la recherche, l’exploitation et la création d’une économie bleue.
9 – CULTURE, JEUNESSE ET SOCIÉTÉ CIVILE
  • Rapprocher les jeunes italiens et français : mise en place d’un service civique conjoint en 2022
  • Protéger et valoriser le patrimoine culturel matériel et immatériel en ayant recours aux programmes et fonds spéciaux de l’Union européenne
  • Favoriser les échanges entre institutions culturelles et les mobilités professionnelles au sein du secteur culturel 
  • Encourager les programmes conjoints de formation artistique (écoles d’art et de spectacle vivant)
  • Rapprocher les industries culturelles et créatives françaises et italiennes dans les processus de co-création et de co-production
  • Favoriser la circulation des artistes, la traduction des oeuvres, et réfléchir à la mise en place d’un plateforme culturelle commune
10 – COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE
  • Structurer la politique transfrontalière franco-italienne par la mise en place du comité de coopération transfrontalière 
  • Améliorer les liaisons transfrontalières comme le suivi du projet Lyon-Turin, l’organisation de services de fret, de transports ferroviaires de marchandises et de personnes dans les tunnels de Fréjus, du Mont-Blanc et la fin de la réalisation du tunnel de Tende
  • Rester solidaires de chaque côté de la frontière avec la coordination, la formation et la coopération des unités de secours, des forces de l’ordre à terre comme en mer
  • Soutenir les espaces de coopérations transfrontalières et la communication entre les populations des régions frontalières
  • Favoriser la consolidation du groupement européen de collectivité territoriales formé par le Parc national du Mercantour et le Parc naturel Alpi Maritime
  • Encourager les projets à dimension transfrontalière et le rapprochement des villes et des métropoles de la région. 
11 – ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
  • Les ministres chargés de l’administration publique sont invités à plus de coopération autour de l’échange de bonnes pratiques, de l’attractivité du recrutement ainsi que de la formation et d’actions conjointes
  • La mise en place d’outils numériques sera privilégiée particulièrement lorsqu’il s’agit d’informations et de bases de données à partager.

Un comité stratégique paritaire permettra la mise en œuvre du présent Traité et de la feuille de route avec la réunion des secrétaires généraux des ministères des Affaires étrangères une fois par an. Il sera chargé d’émettre des recommandations ainsi que d’encadrer l’application des mesures et des dispositifs mis en place.

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