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Réforme de l’authentification des actes publics français : promesse de simplification, réalité contrastée

justice

Depuis le printemps 2025, les modalités d’authentification des actes publics français destinés à l’étranger ont profondément changé. Ce qui relevait auparavant des cours d’appel pour l’apostille et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) pour la légalisation est désormais confié aux notaires. Cette réforme, issue de l’ordonnance du 4 mars 2020 et précisée par le décret du 17 septembre 2021, visait à moderniser et simplifier les démarches pour les Français établis hors de France. Mais plusieurs mois après son entrée en vigueur, le dispositif suscite – c’est le moins qu’on puisse dire – de vives interrogations.

Une réforme en deux temps

Depuis le 1er mai 2025, quinze guichets notariaux répartis sur le territoire français délivrent l’apostille, prenant le relais des parquets généraux des cours d’appel. Le 1er septembre 2025, ces mêmes guichets ont également repris la compétence de délivrance des légalisations, jusque-là assurée par le bureau des légalisations du MEAE. Désormais, le ministère n’est plus compétent en la matière, à l’exception des actes établis dans certaines collectivités d’outre-mer (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis-et-Futuna et Terres australes et antarctiques françaises).

Le transfert s’est accompagné d’une communication officielle dès le printemps et durant l’été 2025, relayée sur les sites France Diplomatie et service-public.fr, ainsi que par une campagne en août annonçant la date butoir du 14 août pour les dernières demandes de légalisation auprès du MEAE. Côté organisation, les six postes (ETP) du bureau des légalisations ont été redéployés : cinq vers la direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire, un dernier étant conservé pour gérer les compétences résiduelles et la coordination juridique.

Des difficultés rapidement signalées

Malgré ces efforts de préparation, la mise en œuvre pratique de la réforme s’avère inégale. Les délais de délivrance des apostilles varient considérablement selon les conseils régionaux de notaires : alors que les chambres de Bordeaux ou de Rennes respectent des délais raisonnables, d’autres, comme celle de Lyon, peuvent imposer une attente de deux à trois mois. Des délais jugés incompatibles avec certaines démarches urgentes, notamment dans le cadre de procédures migratoires ou de reconnaissance d’actes civils à l’étranger.

À ces disparités s’ajoutent des problèmes techniques et juridiques. La plateforme en ligne apostille.notaires.fr, censée faciliter les démarches à distance, connaît encore des dysfonctionnements qui empêchent certains usagers d’obtenir leurs documents. Par ailleurs, l’incertitude demeure quant à l’acceptation, par certains pays, de documents électroniques apostillés : de nombreuses administrations étrangères exigent encore un support papier original, ce qui crée une zone grise dans la reconnaissance internationale des actes.

Les interpellations de vos parlementaires ASFE

Ces difficultés sont remontées aux oreilles des sénateurs de l’ASFE.

Le sénateur Jean-Luc Ruelle a donc interrogé le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la communication mise en place pour informer les Français de l’étranger, mais aussi sur l’évaluation du nouveau dispositif et le redéploiement des effectifs du MEAE concernés par le transfert de compétences.

La sénatrice Sophie Briante Guillemont a, elle aussi, interpellé le gouvernement sur les dysfonctionnements rencontrés depuis mai et septembre 2025. Elle a dénoncé les délais excessifs dans certaines chambres notariales, les inégalités entre territoires, ainsi que les problèmes techniques liés à la plateforme en ligne. Elle demande au garde des sceaux des mesures pour harmoniser les délais, clarifier la reconnaissance des documents électroniques et renforcer la fiabilité des outils numériques mis à disposition des usagers.

Une réforme à ajuster

Présentée comme une simplification administrative, la réforme de l’apostille et de la légalisation semble, pour l’heure, marquée par des disparités régionales et des incertitudes techniques. Le transfert de compétences au notariat reste une évolution importante, mais son efficacité réelle dépendra de la capacité des pouvoirs publics à harmoniser les pratiques et à garantir aux usagers – en particulier les Français établis hors de France – un accès rapide, fiable et reconnu à l’international de leurs documents.

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