Carole de Blesson, Conseillère Italie Centre-Sud des Français de l’étranger pour l’ASFE, s’est entretenue avec le directeur de l’Alliance Française de Malte, Monsieur Thomas Lamouroux. Retour sur cet entretien.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours avant de prendre la direction de l’Alliance Française à Malte ?
Juste avant de prendre la direction de l’Alliance Française de Malte, j’ai travaillé en tant que directeur adjoint dans le sud du Brésil toujours en Alliance. J’ai commencé ma carrière en Espagne comme professeur de FLE (français langue étrangère) en entreprise puis au Soudan à l’Institut Français et en Angola comme volontaire international à l’Ambassade de France au sein du service culturel. J’ai par la suite enseigné en France quelques années à la Mairie de Paris, dans une école américaine, plusieurs écoles de commerce et une association de migrants avant de partir une année en Chine puis de revenir définitivement dans le réseau au Brésil et enfin ici.
J’ai donc toujours privilégié le fait de varier les contextes, les enjeux ou les problématiques au fil de ma carrière.
Pour ceux qui ne connaissent pas bien l’Alliance Française, comment la définiriez-vous en quelques mots ?
L’Alliance Française est l’unique opérateur culturel et linguistique sur l’île de Malte. Elle offre donc à la fois une programmation culturelle riche et variée, notamment à travers les conférences Micro-folie (musée digital interactif) qu’elle organise depuis janvier dernier et des cours de français et de maltais pour les expatriés.
Quels sont les principaux objectifs de l’Alliance Française aujourd’hui ?
Les principaux objectifs de l’Alliance Française sont de trois ordres :
- Développer l’enseignement et l’usage de la langue française
- Favoriser la promotion et le rayonnement des cultures francophones
- Contribuer à la diversité linguistique et culturelle
Comment l’Alliance Française contribue-t-elle à la promotion de la langue et de la culture françaises à l’international ?
Elle y contribue en proposant au public des évènements culturels qui représentent nos valeurs d’inclusion et de diversité tout au long de l’année tels que récemment avec l’exposition du photographe Emilien Buffard et son magnifique projet “Sports Friendly” sur les sportifs LGBTQI+ à travers le monde ou des évènements plus “classiques” tels que le Beaujolais nouveau, le salon du livre maltais ou des ateliers gastronomiques.
Nous nous efforçons de nous adresser à tous les publics : public francophone, maltais, petits et grands. Grâce au dispositif Micro-folie, nous pouvons également désormais proposer un ciné-club mensuel, ce qui n’est pas de trop à Malte où l’offre cinématographique est limitée.
Pour le mois de la francophonie qui a lieu en mars, nous allons proposer un festival de courts-métrages, une superbe exposition qui tourne dans le réseau “écrire en français” et un cycle de conférences en partenariat avec l’Ambassade de France.
Quelles sont les initiatives phares que vous avez mises en place ou que vous souhaitez développer ?
Depuis mon arrivée, j’ai beaucoup œuvré à l’enrichissement de l’offre de cours et cela passe nécessairement par le développement des cours de français professionnel. C’est dans ce sens que j’ai pu mener le projet FOAF (après une première édition au Brésil) avec huit Alliances Françaises du bassin méditerranéen et avec le soutien de l’Institut Français. Ce projet a permis d’une part de réaliser des kits de français sur plusieurs thématiques (français maritime, français de la finance, du tourisme durable, etc.) mais a surtout permis à l’Alliance de doubler ses partenaires entreprise, nous avons désormais comme clients par exemple Betclic (e-gaming) et le ministère des Affaires étrangères maltais.
La mise en place du dispositif Micro-folie est un autre projet déterminant pour l’Alliance Française. Grâce à une convention de prêt de trois ans avec le musée de la Villette à Paris, nous pouvons proposer des conférences mensuelles thématiques innovantes (celle de ce mois-ci ayant pour objet les portraits de femmes à l’occasion du 8 mars): en effet, grâce au numérique, les visiteurs peuvent jouer avec les œuvres d’art, c’est passionnant !
Y a-t-il des projets récents dont vous êtes particulièrement fier ?
Depuis le déménagement de l’Alliance Française en octobre dernier dans les locaux d’un collège public maltais, nous devons faire face à de nouveaux défis. L’école étant située dans un quartier populaire, l’idée d’un nouveau narratif s’imposait : l’idée de faire tiers-lieu en s’ouvrant à de nouveaux publics et en établissant de nouveaux partenariats stratégiques.
En l’occurrence à l’Alliance Française de Malte, ce travail est mené en étroite collaboration avec les associations de défense des personnes en situation d’exil SOS Malta et l’association de défense des droits LGBTQI+ Arc Malta. Ces deux associations font désormais partie de notre projet d’établissement et nous permettent de changer radicalement nos pratiques tout en conservant nos missions et valeurs de promotion de la langue et la culture française.
C’est dans ce cadre que l’Alliance va mettre en place un MOOC sur le sujet des tiers-lieux et organiser une formation en juin prochain à destination d’une quinzaine de directrices et directeurs d’Alliances Françaises et d’Instituts Français.
Avec ce positionnement, l’Alliance de Malte bénéficie désormais d’une visibilité et d’une reconnaissance renforcées.
Comment l’Alliance Française s’adapte-t-elle aux évolutions numériques et aux nouvelles attentes du public ?
Depuis le COVID, les Alliances Françaises se sont largement adaptées au numérique : nos professeur(e)s sont tous compétent(e)s pour enseigner en ligne et nous avons le matériel nécessaire. On note malgré tout un retour au présentiel, que ce soit avec les cours ou les activités culturelles. Nous aurons toujours besoin de contact humain. C’est d’ailleurs le sens du projet de tiers-lieu : offrir à nos élèves un espace convivial et chaleureux.
Quelle est l’importance du réseau international des Alliances Françaises ?
Elle est primordiale : nous disposons d’un réseau de plus de 800 Alliances Françaises dans le monde et cette force du réseau nous permet d’échanger et de nous améliorer constamment sur nos projets et nos pratiques. La fondation Alliance Française située à Paris joue elle aussi un rôle essentiel car elle chapeaute tout ce réseau et organise des rencontres annuelles.
Travaillez-vous en collaboration avec d’autres institutions francophones ou locales ?
Nous travaillons de façon très étroite avec l’Ambassade de France car elle organise des évènements culturels sur lesquels nous sommes souvent partenaires. Elle nous subventionne et nous permet de réaliser des projets ou de développer des cours dans les écoles maltaises. C’est donc un partenaire très important pour nous.
Quels sont les principaux défis auxquels l’Alliance Française fait face aujourd’hui ?
Comme je l’ai déjà mentionné plus haut, nous devons faire face à deux défis majeurs : le premier étant d’ordre matériel ou géographique puisque nous sommes situés dans une zone peu attractive et nous n’avons plus nos propres locaux. Le deuxième défi, qui est universel est celui de la baisse d’inscriptions pour nos cours de français d’année en année, baisse inéluctable et qui est à la fois une opportunité car elle nous oblige à repenser notre modèle qui est par nature très fragile.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui souhaitent soutenir ou s’impliquer dans l’Alliance Française ?
L’aventure Alliance Française est une très belle aventure. Nous accueillons des services civiques chaque année et ils sont ravis de venir travailler avec nous donc n’hésitez pas à envoyer votre candidature !
Un dernier message que vous aimeriez adresser aux francophiles et francophones du monde entier ?
Avec la montée des obscurantismes, nous nous devons d’affirmer nos valeurs haut et fort. La francophonie est un concept et une communauté magnifique, soyons-en fier !
Conseillère des Français de l’Étranger
Italie du Centre et du Sud, st Marin, Vatican et Malte
Représentante ASFE