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Le Parlement européen : quel bilan de ces cinq dernières années ?

A l’approche des élections européennes, l’ASFE revient sur quelques-uns des 389 textes qui ont été adoptés au Parlement européen au cours des cinq dernières années et leurs applications concrètes. A la suite des dernières élections européennes en 2019, les principaux axes de travail du Parlement européen reposaient sur l’adoption d’un pacte vert, la première réglementation de l’intelligence artificielle et des GAFA et de nouvelles règles budgétaires pour l’Union européenne. Cinq ans plus tard, entre la pandémie de COVID et la guerre en Ukraine, les textes adoptés ont re-dessiné les contours de son action et accéléré les transformations envisagées. 

Gestion de la crise sanitaire : l’Union européenne au cœur des négociations 

Début 2020, l’UE met en place avec l’accord des dirigeants quatre axes prioritaires de coopération contre le Covid-19 : limiter la propagation du virus, assurer la fourniture de matériel médical, promouvoir la recherche sur des traitements et des vaccins et soutenir les emplois, les entreprises et l’économie. 

Le 21 juillet 2020, les dirigeants de l’UE se sont mis d’accord sur un budget global de 1 824 milliards d’euros pour la période 2021‑2027. Le plan de relance européen « NextGenerationEU » de 750 milliards d’euros est le premier endettement commun des pays européens et a permis de diminuer les conséquences économiques et sociales du Covid. 

Compétence exclusive des États, le système de santé des pays membres a révélé ses faiblesses lors de cette crise, et la dépendance de l’industrie pharmaceutique de l’Union européenne. Une grande révision avait été appelée des vœux de la Commission pour la rendre plus adaptée aux besoins des citoyens et des entreprises : compétitivité, innovation, baisse des prix, renforcement des normes environnementales…

Au quotidien : 

Vers une Europe de la défense : de la guerre en Ukraine à la souveraineté énergétique 

La multiplication des conflits et des situations de tension qu’elles soient sécuritaires ou énergétiques ces dernières années a poussé l’Union européenne à prendre un certain nombre de décisions communes. 

Pour le conflit en Ukraine, des sanctions ont été prises en commun et un pacte de solidarité à hauteur de 98 millions d’euros a été voté. De plus, le processus d’adhésion à l’Union européenne a été enclenché et exceptionnellement, des livraisons d’armes et d’équipements sont fournis par les états membres depuis février 2022. 

La menace de l’extension du conflit à d’autres pays européens a également poussé le Parlement à voter le règlement pour l’Acte de soutien à la production de munitions (ASAP) qui a permis d’augmenter la production de munitions et de missiles dans l’UE.

Les prémices d’une Europe de la défense se dessinent avec l’adoption d’une « boussole stratégique », livret blanc de la sécurité et de la défense 2030, et la mise en place d’une véritable industrie européenne par le mécanisme des acquisitions conjointes (EDIRPA) à hauteur de 300 millions d’euros. 

Les incertitudes qui ont plané sur le désengagement des Etats-Unis de l’Otan suite aux propos de Donald Trump en 2020, dérogeant aux obligations de l’article 5 du traité prévoyant une assistance mutuelle en cas d’agression, ont aussi poussé les États membres à se rapprocher et à gagner en intensité. 

Enfin, une partie des prêts non-utilisés du plan de relance a servi à la création du plan RePowerEU (300 milliards) pour la souveraineté énergétique européenne afin de s’approvisionner en charbon, gaz et pétrole hors de la Russie. La guerre en Ukraine et les sanctions ont accéléré les processus engagés contre le changement climatique, pour une augmentation des capacités de production des États, de la diversification de leurs sources afin de garantir une plus grande sécurité énergétique. 

Au quotidien :

La gestion des frontières : procédures accélérées et contrôles renforcés

Le Pacte européen asile et immigration a été adopté en début d’année 2024. 

Il impose une réforme de la procédure d’accueil des demandeurs d’asile qui vient compléter le « règlement Dublin III » de 2013. Un mécanisme de « solidarité obligatoire » accompagne désormais cette mesure pour mieux répartir les demandeurs d’asile entre les pays d’Europe du Sud qui concentrent les arrivées, et les autres. Si un pays s’oppose à cette obligation, une amende de 20 000 euros par demandeur sera appliquée.

Les conditions d’accueil et de prise en charge sont également revues pour que le traitement des dossiers soit le plus rapide possible avec la mise en place d’une procédure accélérée. L’objectif est aussi d’offrir un accueil global plus décent et humain. Les demandeurs d’asile auront également la possibilité dans le système classique de faire leur demande auprès du pays de leur choix et non plus du pays dans lesquels ils arrivent.

Au quotidien :

Pacte vert et souveraineté alimentaire

L’une des grandes ambitions de cette mandature était de décarboner l’économie européenne pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Au programme : réforme de la PAC, interdiction de commercialisation des produits issus de la déforestation, réduction des émissions de CO2 d’au moins 55% d’ici 2030, fin du moteur thermique en 2035, taxe carbone aux frontières, suppression de certains pesticides au sein du « FIT for 50 ». 

Dans les faits, les textes sont si nombreux, qu’ils sont compris dans le « Green Deal Implementation Act ». Si les ambitions étaient nombreuses, les compromis l’ont été encore plus pour la mise en place d’une nouvelle stratégie de croissance. 

Pour exemple, le texte sur la « restauration de la nature » a été adopté au prix d’une obligation de moyens et non de résultats; pour la restauration de 20 % des terres dégradées et des mers de l’Union européenne d’ici à 2030, et de tous les écosystèmes d’ici à 2050. 

De même, la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC) – un tiers du budget de l’Union Européenne – n’est rentrée en vigueur que début 2023 et dans une version moins contraignante qu’annoncée. Les deux textes, Green Deal et PAC ne sont pourtant pas totalement alignés, et re-nationalisant une partie des compétences jusqu’alors dévolues à l’Union à l’aide d’un plan national stratégique pour chaque Etat. Les militants et élus écologistes déplorent que cette trop grande marge de manœuvre accordée ne conduise à la baisse des exigences et des résultats pour la transformation d’un modèle agricole plus respectueux de l’environnement et autosuffisant.

Autre exemple, l’approbation du renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour 10 ans en fin d’année 2023. Le rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) dévoilé en juillet 2023 ne reconnaissait pas de « domaine de préoccupation critique » chez les humains, les animaux et l’environnement susceptible d’empêcher l’autorisation du pesticide, tout en soulignant un manque de données. Or, le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé le classe depuis 2015 comme « cancérogène probable ». 

Enfin, la « taxe carbone » ou mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) entrera en vigueur de manière complète au 1er janvier 2026. Ce mécanisme obligera les entreprises européennes qui importent des produits polluants fabriqués hors du continent à payer une compensation pour les émissions issues de la production de ces produits. Il complète le système existant des quotas carbone pour compenser les émissions des entreprises et des industries dans l’Union européenne.

Au quotidien :

Le numérique et la protection des consommateurs : une vigilance accrue 

La loi sur les services numériques ou Digital Services Act (DSA) a permis pour la première fois, de réguler l’activité, la surveillance et les contenus des plateformes numériques géantes dans l’ensemble des pays européens. Loin de vouloir entraver l’innovation, il est question d’encadrer et de responsabiliser les GAFAM, désormais aussi puissants que des États tant économiquement que médiatiquement contrôlant, créant et renforçant l’information à travers le monde. 

Quelques mesures phares de cet ensemble législatif : 

De la même façon, les récentes innovations technologiques ont conduit à l’avènement de l’intelligence artificielle dans nos quotidiens. L’acte d’intelligence artificielle a ainsi été adopté à une très large majorité après des mois de négociations en mars 2023. La généralisation de ChatGPT en 2022 ou de Gemini, a poussé le Parlement européen à vouloir à la fois prévenir les dérives et les dangers de ces outils mais aussi à encadrer leur développement. Ce texte veille à ce que les systèmes mis sur le marché respectent la législation en vigueur en matière de droits fondamentaux, de normes de sécurité et de durabilité environnementale tout en créant une sécurité juridique pour encourager les investissements et l’innovation. Il impose par exemple, un contrôle et des règles harmonisés pour les systèmes d’IA destinés à interagir avec des personnes, à la reconnaissance des émotions et de catégorisation biométrique et aux IA génératives utilisées pour créer ou manipuler des images ou des contenus audio ou vidéo.

Ainsi, la protection des consommateurs face aux industries et aux déséquilibres possibles de rapport de force, a été une priorité de la dernière mandature du Parlement européen. Il s’est engagé dans la lutte contre l’obsolescence programmée et pour l’homogénéisation des dispositifs commerciaux entre les industriels dans une logique de consommation plus sobre et plus pragmatique. 

Au quotidien :

Les textes à suivre avant les élections européennes

Encore plus de 80 textes sont à examiner d’ici début juin : en voici une courte liste non exhaustive.

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