Dans le cadre de la réforme de la fonction publique et notamment celle de la haute fonction publique, la « mise en extinction » des corps des Conseillers des affaires étrangères et celui des Ministres plénipotentiaires a été entériné par un décret publié au Journal officiel le 17 avril 2022.
La diplomatie : un corps spécialisé de hauts fonctionnaires
Après la réforme de l’ENA, nouvellement Institut National de la Fonction publique (INFP) fin 2021, un autre volet de la réforme conduite par Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques est mis en place.
D’ici 2023, le corps « des Conseillers des affaires étrangères » et celui des « Ministres plénipotentiaires » seront mis en extinction. Cela représente environ 800 fonctionnaires sur les 1800 personnes qui composent la catégorie A du Ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE).
La particularité des fonctionnaires de ces corps réside dans leur spécialisation, dans leurs voies d’admission et leurs compétences particulières (langues rares, connaissances fines de régions ou de pays, expérience du terrain…).
Uniformisation du recrutement des hauts fonctionnaires et mobilité facilitée
A l’instar des préfets, les diplomates appartiendront à partir de 2023 au sein d’un seul et même corps non spécialisé de la fonction publique appelé « corps des administrateurs de l’État ». Créé par l’ordonnance du 2 juin 2021, ce corps interministériel vient mettre fin à la traditionnelle professionnalisation du corps diplomatique instauré au XVIIIème siècle. Tout « administrateur de l’État » – préfets, inspecteurs généraux des finances, etc…- pourront désormais être nommés diplomates, quel que soit leur ministère d’origine. Des personnalités extérieures à la fonction publique pourront également être nommées.
Les fonctionnaires actuellement en poste peuvent d’ici 2023, choisir de rester dans leur corps actuel mais sont incités à rejoindre celui des administrateurs de l’Etat. Dans les deux cas, ils anticipent un manque de visibilité sur la suite de leur carrière.
Une réforme vivement critiquée
Pour les artisans de la réforme, celle-ci permet mettre fin aux «carrières à vie» au plus haut de l’appareil d’État, de flexibiliser le recrutement et les mobilités des hauts fonctionnaires, de décloisonner pour bénéficier d’un vivier de compétences élargie.
Femmes et hommes politiques de tous bords ont dénoncé un système de nomination favorisant le « copinage ». En effet, ce nouveau dispositif fait craindre la multiplication de nominations politiques, au détriment des diplomates professionnels, comme c’est l’usage aux Etats-Unis.
Les fonctionnaires du Quai d’Orsay s’inquiètent de voir que la France sera désormais le seul grand pays occidental sans diplomates professionnels. Ces spécialistes de la politique étrangère craignent une perte d’expertise et aussi une politisation des nominations face à des interlocuteurs aguerris aux négociations et aux entre-jeux diplomatiques.
En pleine crise russo-ukrainienne, il apparait à beaucoup que la publication de ce décret désorganise les rangs, pénalise les agents et pourrait à terme entraver l’action diplomatique et la place de la France de le règlement des crises internationales.
Les syndicats dénoncent eux l’uberisation du corps diplomatique » remplacé par un corps d’administrateurs généralistes et les meilleurs postes distribués à des profils extérieurs nommés par le fait du Prince ».