Dimanche prochain, les Français sont appelés aux urnes pour un scrutin présidentiel très singulier. C’est la première fois, sous la Vème République, qu’il se déroulera dans un climat de guerre en Europe. L’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui va avoir des conséquences multiples sur la scène internationale, est-elle propre à changer la donne de l’élection suprême française ? Sans doute a-t-elle placé Emmanuel Macron davantage encore sous le feu des projecteurs puisque le hasard a voulu qu’il soit, en ce premier semestre 2022, président du conseil de l’Union européenne, donc en première ligne.
Par ailleurs, en temps de crise, on sait que l’opinion se range volontiers derrière son chef, comme par un réflexe patriotique. Au-delà de ce contexte pour le moins inattendu, cette élection présente plusieurs inconnues. La première est évidemment le niveau d’abstention. Celle-ci ne cesse de progresser, de scrutin en scrutin, affectant surtout le public jeune, qui accable souvent le personnel politique de tous les défauts. De 22% au premier tour, en 2017, elle pourrait atteindre plus de 30% cette fois si l’on en croit les sondages. Pourcentage impressionnant qui fait craindre que ce phénomène soit synonyme de délitement du corps social. La colère des « Gilets jaunes » a été interprétée comme la traduction de cette fragmentation.
La seconde inconnue est le nom du vainqueur. Certes, toutes les études d’intention de vote, ou presque, donnent depuis un an la victoire du président sortant pour acquise. Emmanuel Macron a, il est vrai, fait toujours course en tête mais, depuis sa déclaration de candidature, on note une remontée spectaculaire de Marine Le Pen, sa poursuivante, qui finit très fort. Si celle-ci devait se qualifier pour le second tour, elle bénéficierait, semble-t-il, d’une réserve de voix importante provenant notamment d’Eric Zemmour.
La troisième inconnue porte sur l’après-scrutin : quelle majorité pour le vainqueur ? La réponse sera apportée deux mois plus tard après des élections législatives programmées pour la mi-juin. C’est à ce moment-là que le paysage politique commencera sa recomposition. Mis à mal depuis cinq ans par un chef de l’Etat se revendiquant d’une politique « et de droite et de gauche », les deux piliers de la vie politique depuis soixante ans, le PS et LR – héritier du RPR et de l’UMP – paraissent en bien mauvaise posture. Mais ce long épisode électoral ne fait que commencer. Nous aurons l’occasion d’y revenir maintes fois d’ici à cet été…
L’équipe de l’ASFE