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Administration Trump : entre guerre commerciale et risque inflationniste

Conseiller des Français de l’Étranger dans la circonscription consulaire de New York, Patrick Pagni nous parle de la situation économique et des tensions commerciales entre les États-Unis et leurs partenaires. Alors que l’administration Trump a décidé d’imposer de nouveaux droits de douane sur les importations canadiennes, les effets de cette politique commencent déjà à se faire sentir sur l’économie américaine. Risque inflationniste, impact sur le pouvoir d’achat des ménages, répercussions sur les marchés financiers : quelles seront les conséquences de cette guerre commerciale et quelles perspectives pour les Républicains à l’approche des élections de 2026 ?

Guerre économique entre les Etats-Unis et le Canada : le retour de l’inflation ?

Le président Trump vient de porter à 25% les droits de douane sur les produits en provenance du Canada, arguant du fait que ce pays profitait indûment de son commerce avec les Etats-Unis. Au-delà de l’inconsistance de cette affirmation (le dernier traité de commerce Américano-Canadien avait été négocié par Trump durant son premier mandat), les mesures prises sont potentiellement dommageables pour le consommateur américain. En effet, une grande partie de l’électricité consommée par les états du nord des Etats-Unis provient du Canada : 15% pour l’état de New York, 40% pour le Vermont, et la région du Middle West (Michigan, Minnesota) en dépend aussi largement. Doug Ford, premier ministre de l’Ontario, vient d’annoncer qu’à son tour sa province allait surtaxer ses livraisons d’électricité ajoutant ainsi environ $100 par an à la facture moyenne de ses clients américains.

À cela s’ajoute le fait que les droits de douane touchent des produits canadiens qui sont indispensables à l’industrie américaine. Celle-ci importe du Canada environ 60% de ses besoins en aluminium, car elle ne les satisfait qu’à hauteur de 20%, 45% du nickel et du valladium qui lui sont nécessaires et 25% de ses besoins en acier. Augmenter la production d’aluminium ou d’acier aux Etats-Unis ne peut se faire rapidement. Le consommateur final paiera donc plus cher les produits manufacturés à partir d’importations canadiennes, notamment dans les secteurs de l’automobile, de la construction de logements, et de l’électroménager.

Tout ceci ne peut que relancer une inflation qui n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant la crise du COVID (2,8% en tendance annuelle à fin février, en baisse de 0,2% par rapport à fin janvier). Cela risque de mettre un terme au mouvement de baisse des taux d’intérêts qui permettait aux ménages américains d’espérer refinancer leurs hypothèques à meilleur taux. D’autant que, parallèlement, les produits alimentaires de première nécessité venant du Mexique subiront eux aussi des droits de douane plus élevés. On constate d’ailleurs un regain d’inquiétude des ménages sur la hausse de ces produits, entrainant des achats d’anticipation.

Au-delà des pays riverains des États-Unis, la hausse des droits de douane va aussi frapper les produits en provenance de Chine, que les Américains importent massivement, ainsi que ceux originaires de l’Union Européenne. Il revient à la mémoire du signataire de cette chronique une phrase d’Alain Madelin, « Quand on mettra un impôt sur les vaches, ce ne sont pas les vaches qui paieront l’impôt ». Rien ne paraît plus vrai ces jours-ci aux Etats-Unis.

Avec le retour de l’inflation, y a-t-il un risque de récession ?

En cas de retour de l’inflation, une reprise de la hausse des taux d’intérêts n’est pas à exclure. Combinée à un ralentissement de l’embauche sur fond d’incertitude économique, cette mesure pourrait impacter négativement un taux de croissance qui restait très élevé (2,7%) comparé à celui de l’Union Européenne (0,9%). Les marchés boursiers ont d’ailleurs réagi en baissant brutalement à la suite de cette annonce. 

Un retour de l’inflation entrainant la fin du processus de la baisse des taux, couplé à un ralentissement économique, ne manquerait pas de rendre très difficile la position des Républicains lors de la campagne électorale de 2026 pour renouveler en totalité la Chambre des Représentants, où le parti du président ne dispose que d’une très faible majorité (2 sièges). 

Patrick Pagni, Conseiller des Français de l’Étranger dans la circonscription consulaire de New York.
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