Demain, 15 septembre, nous célébrons – comme tous les ans depuis sa proclamation par l’assemblée générale de l’ONU en 2007 – la journée internationale de la démocratie. Un mode de gouvernance, un concept, un idéal… qui a particulièrement été mis à l’épreuve ces dernières années.
Non seulement les événements géopolitiques récents démontrent que la paix et la démocratie ne sont pas un acquis, et que la défendre est une nécessité de tous les jours, mais de plus, de nombreux signes, inquiétants, révèlent que le concept même de démocratie a perdu de sa superbe. Les études de politologues reconnus[1] font état d’un attachement de moins en moins important à la démocratie – en particulier parmi les plus jeunes – et l’attrait pour les alternatives autoritaires. L’abstention massive, qui touche la France mais pas seulement, est un signe inquiétant de cette « déconsolidation » démocratique.
Le droit de vote n’a pas toujours existé. Il a été acquis, obtenu de haute lutte – en particulier par et pour les femmes – et les rédacteurs de nos Constitutions contemporaines ont rarement douté, lors de leurs rédactions respectives, du fait que ce droit serait exercé. C’est la raison pour laquelle très peu de pays au monde ont rendu le vote obligatoire. Il existe cependant, en Belgique, en Grèce, au Luxembourg, en Australie ou encore en Argentine.
En France, seule l’inscription sur la liste électorale est une obligation. Le droit de vote est perçu comme une liberté individuelle, que chaque citoyen peut choisir ou non d’exercer. Il n’y a qu’une seule élection qui soit obligatoire : les élections sénatoriales, dont les opérations de vote débutent, pour les Français de l’étranger, dans deux jours, le 16 septembre 2023, les votes anticipés étant centralisés à Paris et dépouillés en même temps que le vote à l’urne, le dimanche 24 septembre prochain.
Pourquoi ce vote est-il le seul obligatoire ? A cause de la compréhension du lien juridique qui lie un grand électeur avec les citoyens qu’il représente. En effet, le suffrage universel direct donne aux élus qui en sont issus une fonction particulière : l’obligation, d’ordre conventionnelle, de les représenter lors de l’élection du degré supérieur, celle du suffrage universel indirect. En étant élu, le grand électeur accepte au même moment d’exercer cette délégation. C’est pourquoi le fait de ne pas remplir cette fonction, en s’abstenant, est passible d’une sanction.
En France, il s’agit d’une petite sanction financière d’ordre symbolique – 100 euros – qui n’en demeure pas moins régulièrement mise en œuvre. Un contrat crée des obligations entre ceux qui l’ont conclu. Le mandat exercé par le délégué sénatorial est une sorte de contrat entre les citoyens et leurs représentants directs. Les Conseillers des Français de l’étranger et les délégués consulaires connaissent l’importance de cette fonction, comme en témoigne leur participation toujours exemplaire.
Préconisé comme une solution pour freiner l’abstention, le vote obligatoire est une mesure régulièrement débattue par les politiques français. Pour le moment, aucun consensus sur cette question n’a émergé. Même dans certains pays où le vote est obligatoire, l’abstention augmente et les citoyens ont tendance à assumer le non-respect de cette obligation, pratiquée comme un geste de mécontentement. Signe que le mal qui ronge nos démocraties n’est pas purement technique, mais bien plus profond. A nous, collectivement, d’être vigilants…
L’équipe de l’ASFE
[1] R. Stefan Foa et Y. Mounk, « The Danger of Deconsolidation », Journal of Democracy, Juillet 2016, Volume 27, Numéro 3, The Johns Hopkins University Press.