Après quelques jours de suspense, le verdict est tombé : les deux motions de censure déposées contre le gouvernement n’ont pas obtenu la majorité nécessaire. La réforme des retraites est donc passée, au terme d’une séquence parlementaire agitée et grâce au recours à l’article 49-3 de la Constitution. Une procédure utilisée pour la centième fois sous la Vème République mais qui, invariablement, est l’objet d’un procès en illégitimité. Le débat sur les retraites que la France vient de vivre appelle deux remarques.
D’abord, s’il est terminé sur le front parlementaire, il continue dans le pays, conduit par des syndicats très mobilisés, déterminés pour certains à bloquer l’économie par des appels à la grève dans des secteurs clés comme ceux des transports ou de l’énergie. Nul n’a oublié le précédent du Contrat nouvelle embauche (CPE) qui, en 2006, avait été voté, promulgué, mais jamais appliqué. Des partis, comme le Parti communiste, souhaitent parallèlement recourir au référendum d’initiative partagé (RIP) en recueillant 4,7 millions de signatures dans la population pour l’organiser et espérer qu’il dégage une majorité hostile à la réforme. Pour aboutir, ce RIP doit obéir à des conditions précises, mais rien ne dit qu’elles soient impossibles à remplir. Par ailleurs, des recours devant le Conseil constitutionnel, sur le fond ou la forme de la réforme, devraient normalement être déposés dans les semaines à venir. C’est dire si le débat sur les retraites n’est pas clos. De fait, les manifestations dans les rues connaissent un regain de persévérance.
Ensuite, les tensions nées à la faveur de cette réforme traduisent un climat général difficile. La société à changé. La quête de sens, de bien-être et le désir de privilégier sa vie privée sont devenus plus importants. Ce qui contraste avec un certain pessimisme face à l’avenir que la crise sanitaire a souligné : crainte face au réchauffement climatique, perte de confiance face aux aléas de la vie. Cette atmosphère, lourde et explosive, est latente et trouvera ses voies d’expression. Déjà, la crise des Gilets jaunes avait révélé ce malaise.
Dans ces conditions, que peut faire Emmanuel Macron ? Son intervention télévisée, à l’heure du déjeuner, le 22 mars, a apporté peu de réponses. Le chef de l’Etat est apparu droit dans ses bottes. Pour le moment, Elisabeth Borne est confirmée à Matignon. Il ne pouvait en être autrement aussi longtemps que le Conseil constitutionnel ne s’est pas prononcé.
L’équipe de l’ASFE