La nomination d’Elisabeth Borne à Matignon marque un tournant dans la vie politique française. L’action de celle-ci marquera- t-elle pour autant l’histoire de la Vème République ? Le tournant, c’est évidemment la désignation d’une femme au poste de premier ministre. Très en retard sur ses voisins, notamment scandinaves, la France n’a connu qu’une seule première ministre, Edith Cresson. Qui fit un passage de dix mois à cette fonction, sous l’autorité de François Mitterrand, de mai 1991 à avril 1992. La mémoire collective ne gardera pas un souvenir impérissable de ce magistère qui s’est surtout distingué par le machisme de la classe politique à l’endroit de l’impétrante.
Si la France est souvent à l’avant-garde sur la scène internationale, elle ne brille guère par l’égalité entre les sexes. Rappelons que le droit de vote fut accordé aux femmes en 1944 par le Général de Gaulle. La nomination d’une femme à Matignon ne devrait même plus être un sujet aujourd’hui : c’est pourtant le cas en France.
Qu’en est-il de la trace dans l’histoire que laissera Elisabeth Borne ? Il est trop tôt pour le dire alors que l’on ne connaît qu’imparfaitement sa feuille de route. Emmanuel Macron, qui recherchait un profil « social, écologique et productif », a tracé dans un tweet, cette semaine, les priorités de sa nouvelle cheffe du gouvernement : « Ecologie, santé, éducation, plein emploi, renaissance démocratique, Europe et sécurité ». Un programme varié et chargé qui sera vraisemblablement bousculé par la conjoncture économique.
Une nouvelle donne est apparue ces derniers jours avec l’arrivée de gros nuages dans le paysage : inflation, taux d’intérêt à la hausse, flambée des sources d’énergie et matières premières. La guerre en Ukraine et la persistance de la pandémie en Asie, surtout en Chine, dégradent considérablement le climat. Il se pourrait que le nouveau gouvernement soit appelé au front pour limiter la casse – chômage, baisse du pouvoir d’achat – et éteindre les colères qu’elle pourrait provoquer.
Comment dans ces conditions, alors que le malaise social se répand, lancer les grandes réformes que nécessite l’état du pays ? Les services publics – école et hôpital -, l’industrie, la protection sociale – retraite – doivent, de l’avis de tous les experts, être restructurées de fond en comble. C’est dire si la nouvelle première ministre ne risque pas de s’ennuyer… Il lui faudra être forte, très organisée et pédagogue pour conduire la France là où le veut le président de la République.
L’équipe de l’ASFE