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L’école Cousteau : un établissement français tourné vers le monde de demain

Il y a quelques semaines, la Sénatrice Evelyne Renaud Garabedian s’est rendue dans l’Ouest canadien. Elle a notamment rendu visite aux équipes pédagogiques de l’école française internationale de Vancouver, l’école Cousteau. C’était l’occasion pour nous de poser quelques questions à Maxence Baudry, directeur adjoint, et à Julien Wexsteen, enseignant en sciences et technologies, sur les projets et les spécificités de cet établissement.

Pouvez-vous nous présenter l’école Cousteau en quelques mots ? 

L’école Cousteau est une jeune école qui compte 248 élèves répartis en 17 classes de la toute petite section à la 3ème. Si le campus principal se trouve à North Vancouver, à proximité des forêts, montagnes et des plages, nous avons une autre structure dans le centre de Vancouver qui s’appelle la Calypso et qui héberge deux classes d’élèves de 3 et 4 ans. Nous sommes homologués par l’AEFE. Nous sommes également membres de la Mission Laïque Française (MLF), du Council of International School (CIS), de la Fédération des Associations d’Écoles Indépendantes (FISA) et de l’Association des Écoles Françaises en Amérique du Nord (AFSA). Enfin, et nous en sommes très fiers, notre école est membre platine d’ÉcoÉcole Canada (le plus haut rang).

Quelles sont les particularités / spécificités de votre école ?

Notre école est la seule dans la province à proposer l’enseignement de deux programmes, celui de l’Éducation Nationale français mais aussi celui de Colombie-Britannique. A l’école Cousteau nous prenons le meilleur de ce que nous offre le Canada et la France. Nous avons mis en place un service d’orthopédagogie pour prévenir les difficultés dans l’acquisition de l’écriture, la lecture et les mathématiques. Nous sommes une école tournée vers le monde de demain tant sur les aspects environnementaux que sur les nouvelles technologies et les nouvelles pratiques pédagogiques.

Nous avons fait l’acquisition récente de tablettes numériques et nos enseignants sont formés pour en faire un usage pédagogique pertinent. La mise en place des corridors actifs permets aux élèves de pouvoir faire une pause active dans leur journée afin de mieux se concentrer par la suite et notre programme d’apprentissages sociaux-émotionnels donne aux élèves les outils pour mieux comprendre qui ils sont, les émotions qu’ils vivent et mieux vivre dans une communauté empathique et bienveillante. Nos programmes de webradio et de webTV permettent aux élèves de développer des compétences essentielles pour évoluer dans le monde de demain. Enfin, à Cousteau, nous sommes attentifs aux dernières recherches en éducation pour toujours proposer un enseignement pertinent et efficace. Les enseignantes de maternelle participent par exemple à une recherche collaborative sur l’acquisition du langage menée par une enseignante de l’école dans le cadre d’une thèse à l’Université de Paris X.

L’école Cousteau est la première école canadienne à être accréditée Eco-Ecole par la Fondation pour l’Education Environnementale. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre action au quotidien avec les élèves et le projet pédagogique ?

Devenir une ÉcoÉcole nous a encouragé à penser et procéder d’une manière nouvelle. Nous tendons à axer nos enseignements et nos codes de vie sur des questions environnementales et citoyennes afin de former nos élèves à devenir les écocitoyens de demain. Comme le dit très bien notre élève Anaïs de CE1 lors de l’une de nos présentations à l’occasion de forums pédagogiques; un éco-citoyen, c’est une personne qui agit avec respect et avec responsabilité dans l’intérêt de la planète.

Les acteurs principaux de notre ÉcoÉcole sont représentés par une éco-équipe comprenant un enseignant par cycle et notre bibliothécaire documentaliste, par nos élèves éco-délégués élus chaque année et composés d’un élève par classe du CE1 à la 3ème, par les éco-parents qui nous apportent un soutien externe, par notre éco-direction composée de Cécile Dione, notre directrice et de Maxence Baudry, notre vice-directeur, ainsi que par moi-même, le coordinateur ÉcoÉcole.

Nous organisons un éco-comité par mois durant lequel les éco-délégués et l’éco-équipe se réunissent pour prendre des décisions, pour réfléchir à de futurs éco-actions à travers de long remue-méninges et pour faire un bilan mensuel de nos éco-activités. Une fois l’éco-comité terminé, deux à trois élèves sont choisis pour enregistrer notre Web Radio “éco-info” afin de communiquer sur ce qui s’est déroulé lors de cette assemblée. Cet enregistrement est ensuite envoyé aux enseignants titulaires qui l’émettent dans leur classe pour que les élèves puissent être informés sans avoir à imprimer du papier pour cela.

Nous menons des actions éco-citoyennes tout au long de l’année. Certaines font partie de notre vie quotidienne, d’autres sont récurrentes ou encore éphémères. 

En ce qui concerne les actions quotidiennes, nous tentons de gérer nos déchets au mieux. Dans chaque salle, nous avons une poubelle verte en guise de compost, une poubelle jaune pour le papier et le carton, une poubelle bleue pour les récipients et une poubelle noire pour le reste. Nous alimentons un lombricomposteur, c’est-à-dire un compost sans odeur qui se trouve à l’intérieur de l’école et qui consiste à nourrir des lombrics avec nos déchets organiques. Nous ramassons les déchets de notre cour de récréation une fois par semaine. Nous encourageons les familles de nos jeunes à préparer des repas sans déchets tous les mardis et sans chair animale tous les jeudis. Nous avons construit un jardin potager et allons cultiver des légumes. A l’extérieur de notre préau, nous avons mis en place un jardin pollinisateur en lien avec un hôtel à insectes que nous avons également construit. Une fois par semaine, un groupe d’élèves se retrouvent à la bibliothèque pour l’éco-club qui consiste à faire des activités autour de l’écologie, comme par exemple la construction d’abris à animaux à l’aide de matériel recyclé ou un calendrier de l’avent écologique contenant des idées d’éco-actions à ériger dans les différents classes. Enfin, nous ramassons les déchets de notre cour de récréation une fois par semaine, classe après classe.

En ce qui concerne les actions récurrentes, nous entreprenons des nettoyages communautaires deux fois par année en ramassant les déchets se trouvant sur différentes plages. Chaque année, en période de Noël, nous organisons des demandes de dons. En ce moment-même, nous en sommes presque à $1200 de notre collecte actuelle pour donner de l’argent aux étrangers (notamment d’amérique latine) qui ont perdu leur travail suite aux récentes inondations et qui ne reçoivent pas autant d’aide du gouvernement que les travailleurs locaux. L’an dernier, nous avons récolté $3150 que nous avons donné à la banque alimentaire de Vancouver, afin de donner à manger à des gens qui n’en ont pas. Nous sommes passés dans le journal local et nous avons été remerciés par Jonathan Wilkinson, le ministre de l’environnement et du changement climatique du Canada. Nous avons regardé les documentaires “HOME” et “Legacy” de Yann Arthus-Bertrand, qui nous a fait l’honneur de nous rencontrer en visioconférence, ce qui a permis à nos élèves de l’interroger et d’entendre ses conseils. Nous avons visionné le documentaire “Bigger Than Us” de Flore Vasseur, à qui nos élèves ont pu poser des questions en partageant un beau moment d’échange et, de nouveau, de recevoir des conseils. Dans le but de partager ces échanges avec toute l’école, nos éco-délégués ont produit une Web Radio édition spéciale qui a été diffusée dans toutes les classes de l’école. Chaque année, la classe de CM2 reçoit des dons d’oeufs de saumons du Pacifique (Oncorhynchus keta) d’un partenaire local; les élèves peuvent alors étudier le cycle de vie de cet animal de la famille des Salmonidae et relâcher les fretins dans la rivière pour participer à l’expansion de cette espèce.

Actuellement, nous avons demandé aux familles de notre école de nous apporter leurs arbres de Noël (ceux qui ont des racines) en janvier pour les planter dans notre cour afin de leur donner une seconde vie et de participer au progrès de la production d’oxygène, à notre échelle. Durant une année, nous pourrons fertiliser nos arbres en partie avec nos déchets provenant de nos composts. Enfin, l’année prochaine, ces familles pourront venir rechercher leur arbre au lieu d’en acheter d’autres. Ce sera l’occasion de supplanter la production d’autres êtres vivants, bien souvent destinés à mourir, par un individu déjà existant, et de faire des économies.

En ce qui concerne les actions éphémères, nous avons reçu Jonathan Wilkinson, le Ministre de l’environnement et du changement climatique du Canada, ainsi que Philippe Sutter, le Consul Général de France à cette époque. Nous leur avons fait visiter notre ÉcoÉcole avant de présenter nos éco-actions par nos élèves éco-délégués. Ils sont venus lors de notre célébration de la journée internationale de la gastronomie durable. Ce jour-là, nous avions demandé aux familles de préparer des exemples de repas pensés, élaborés et emballés de manière environnementale. La télévision et la radio locale étaient présentes. Nous recherchons à augmenter notre visibilité afin d’avoir un impact plus important dans le monde, dans un but environnemental, car en démontrant ce que nous faisons pour la planète, nous espérons que d’autres organisations ou individus en prennent de la graine.

Les élèves de notre éco-club sont passés à la radio lors de la COP26 pour donner leur avis positif sur cet événement. Nos élèves éco-délégués et nous avons présenté notre école éco-citoyenne lors d’un forum pédagogique en direct devant bien des écoles françaises du monde entier lors de la semaine de la citoyenneté. Nous avons été interviewés par la radio locale lors de cette épopée. Nous allons représenter notre ÉcoÉcole lors de deux nouveaux forums en janvier 2022. Nous allons mettre en place un échange en visioconférence entre nos éco-délégués et ceux d’une école d’Ankara. Nous allons faire un échange de lettres entre notre classe de 4ème et une classe de même niveau en Suisse pour engager des discussions sur la manière de trier les déchets dans nos deux pays; il s’agira d’un échange bilingue anglais-français. Les élèves du collège ont créé une exposition de panneaux sur des sujets comme la consommation des énergies fossiles, basée sur le film documentaire “HOME” de Yann Arthus-Bertrand. Les élèves de 6ème ont rédigé un article de journal édition spécial sur le CO2. Notre classe de 5ème fait partie du programme “Graines de Reporters Scientifiques” de l’association TARA Océans qui a pour but de transformer nos élèves en journalistes écologiques afin de produire une vidéo présentant leurs recherches sur le thème des petites îles vulnérables et des réfugiés climatiques.

Quel est l’intérêt de mettre en place un repas « zéro déchet » et « zéro viande » par semaine ? 

Les parents de nos élèves préparent des repas sans déchets et sans chair animale pour leurs enfants une fois par semaine. 

En ce qui concerne les repas sans déchets, le but est de réduire la production de déchets, recyclables ou non. L’idée est de préparer un repas, chaque mardi, dans un récipient qui sera réutilisé, semaine après semaine. Les aliments ne doivent pas être emballés de matière jetable et les couverts doivent être réutilisables également.

En ce qui concerne les repas sans chair animale chaque jeudi, nous expliquons à nos élèves que beaucoup d’énergie est nécessaire à la production de viande (un animal herbivore doit boire de l’eau et manger d’autres êtres vivants qui eux-même demandent de l’énergie à la production) et que cette énergie n’est pas toujours produite de manière renouvelable. Si tout le monde joue le jeu, ne pas manger de chair animale une fois par semaine aurait un impact à notre échelle si on compte le nombre d’élèves dans l’école, le nombre de repas par année, le nombre de personnes de la même famille que nos élèves qui consommeraient de la même manière en même temps. Si nous consommons moins de chair animale, la production de celle-ci devrait réduire. Les vaches par exemple, produisent du méthane lors de leurs flatulences et celui-ci est un gaz à effet de serre qui participe au réchauffement climatique (ce qui mène des êtres humains à quitter leur pays qui sont inondés !). Le nombre d’êtres humains est en pleine expansion et il faut nourrir tous ces gens, donc si nous mangeons de plus en plus de viande, nous produisons indéniablement de plus en plus de gaz à effet de serre. Et finalement, nous diminuons une certaine cruauté animale.

Lors de nos repas spéciaux, les éco-délégués comptent les repas avec déchets/viande et notent le nombre dans un tableau. Les plus grands d’entre eux produisent des graphiques statistiques qui montrent l’évolution de ces éco-actions à travers le temps. Nous sommes fiers d’avoir un faible taux de production de déchets/viande lors de ces repas et que beaucoup de familles jouent le jeu et continuent de le faire.

Nous avons pu observer que certains jeunes se mettent à éduquer leurs parents de manière environnementale afin de participer à cette éco-action, ce qui prouve qu’ils ont compris les raisons de cette manière de procéder, car quand on est capable d’expliquer un concept, c’est que nous l’avons intégré, n’est-ce pas ?

En préparant des repas de la sorte, les familles élaborent elles-mêmes de plus en plus de stratégies culinaires ce qui amplifie leurs compétences en matière de consommation environnementale, ce qui pourrait avoir un impact positif sur la production alimentaire et de déchets dans l’avenir de ces personnes.

Quelles observations ou changements de comportement avez-vous pu observer au cours des derniers mois/années avec l’éco-école ? 

Les jeunes de Cousteau démontrent une sensibilité grandissante aux problèmes environnementaux au fil du temps. Cela se ressent dans leur manière d’agir et d’exprimer leurs pensées. Il n’est pas rare d’entendre un élève rappeler à un autre qu’il serait mieux de se comporter d’une manière écocitoyenne au cas où ce dernier venait à manquer de vigilance. Par exemple, un élève peut rappeler à un autre que même si son repas principal a été sans déchets, son dessert se trouve être un yaourt dans un récipient qui est voué à ne pas être réutilisé, et donc qu’il faudra utiliser de l’énergie pour produire le contenant du prochain dessert et ainsi de suite. D’ailleurs, chaque année, nos jeunes rédigent un nouvel éco-code qui liste une série d’actions à faire ou ne pas faire de manière à préserver intelligemment notre planète et ses habitants.

Nos élèves semblent avoir pris conscience qu’ils sont les acteurs du monde de demain dans lequel leurs aînés ne seront plus. Ce monde leur appartiendra et nous nous efforçons à leur donner un regard objectif quant à leur implication future dans l’avenir de notre planète, de leur planète.

Vous avez également un programme de Web Radio. Pouvez-vous nous en parler ? 

Le programme de web radio revêt plusieurs intérêts. Il est un outil d’apprentissage de la langue orale. Dès le plus jeune âge les élèves peuvent être enregistrés dans le cadre d’émissions. Trop souvent l’enseignement du langage oral est oublié dès lors que les élèves s’en approprient les bases or il est très lié à l’acquisition de la lecture et de l’écriture d’autant plus dans une école internationale. Les émissions de radio sont écrites et les énoncés oraux sont pensés avant d’être dits. La web radio est ainsi un formidable outil pour apprendre à parler, à construire son discours. Par ailleurs, à l’aide des enregistrements, les élèves retravaillent les discours un peu comme nous utiliserions un brouillon pour retravailler un écrit. 

La web radio est aussi un formidable outil de valorisation des travaux réalisés par les élèves, ils sont investis et motivés par l’idée de produire un travail de qualité qui sera publié en ligne. La web radio est également une plage de liberté à laquelle les élèves peuvent avoir accès pour s’exprimer et participer à la vie de l’école. 

Enfin, à Cousteau et dans le cadre de nos actions écologiques, nous utilisons la web radio comme un outil de communication qui permet de réduire la consommation de papier. En effet, les comptes-rendus des réunions ÉcoÉcoles sont enregistrés par les élèves, puis écoutés dans les classes et ceci dans les deux langues en anglais et en français pour valoriser notre bilinguisme et permettre une communication à toute la communauté. 



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