À la suite des élections consulaire de mai 2021, les Conseillers des Français de l’étranger nouvellement élus sont appelés aux urnes le 04 et 05 décembre prochain pour élire leurs représentants à l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE). L’occasion pour l’ASFE de s’intéresser davantage à cette instance qui représente les Français établis hors de France. Martine Schoeppner, actuelle vice-présidente de l’AFE, répond à nos questions.
Qu’est-ce que l’Assemblée des Français de l’étranger et quelles sont ses principales missions ?
C’est la loi 2013-659 qui définit les missions de l’AFE, précisée par le décret 2014-144.
« Elle PEUT être consultée par le Gouvernement, le président de l’Assemblée Nationale et celui du Sénat sur la situation des Français établis à l’étranger et sur TOUTE question consulaire ou d’intérêt général, notamment culturel, économique et social les concernant.
L’AFE peut également, de sa propre initiative, réaliser des études et adopter des avis, des résolutions et de motions.
Son rôle est donc très réduit et c’est donc la qualité de son travail qui permettra de l’élargir et d’en tirer le maximum mais surtout d’être non seulement consultée plus systématiquement mais écoutée. Des avis mal rédigés, ne tenant pas compte des textes sont ignorés.
L’AFE peut aussi se prononcer lors d’un débat sur le rapport du gouvernement qui lui est présenté chaque automne et peut donner un avis. Elle est également informée des dispositions du projet de loi de finances sur les matières concernant les Français de l’étranger et peut faire part de ses observations au gouvernement.
Elle est également représentée dans certaines instances et organismes au sein desquels elle nomme un ou des représentants. (CFE ; Conseil national de l’Aide juridique etc…).
Le président et les deux vice-présidents sont également membres du bureau de vote électronique pour les législatives et choisissent leur suppléant parmi les élus AFE. Pour les consulaires les représentants du BVE peuvent être désignés par l’AFE à l’extérieur de celle-ci.
Les conseillers AFE ont également la possibilité de poser des questions écrites et orales à l’administration ou au gouvernement.
Enfin les conseillers à l’AFE ( ainsi que les présidents de conseils consulaires) peuvent parrainer un candidat à l’élection présidentielle.
Comment est composée l’AFE ? Qui peut y siéger ?
Depuis 2014, elle est composée de conseillers élus par leurs pairs dans le cadre de grandes circonscriptions. Les conditions de l’élection mises en place en 2014, sans aucune consultation rend la représentation totalement bancale et déséquilibrée, certains élus représentant des circonscriptions étrangère à la leur, et de très nombreuses régions n’étant même pas représentées.
Seuls les conseillers élus à l’AFE peuvent y siéger. Les parlementaires n’en font plus partie mais sont invités à suivre les débats. Les séances sont publiques (sauf décision contraire de l’AFE) .
Elle est présidée par un président élu parmi les élus, accompagné de deux vice-présidents, également élus par l’AFE, tous les trois pour 6 ans. L’AFE élit également un bureau de 6 membres. Les modalités de leur élection et la durée de leur mandat ne sont pas fixées par les textes et peuvent donc être définies dans le règlement intérieur de l’AFE. Ce dernier doit être établi lors de la première session. Le règlement intérieur de la précédente AFE n’est pas déterminant pour les élections, nominations et mise en place de la nouvelle AFE, sauf si elle en décide autrement.
Le règlement intérieur précise le mode de fonctionnement de l’AFE mais ne peut en aucun cas être contraire à la loi ou au décret.
L’AFE peut créer des commissions (un maximum de 6) au sein desquelles les membres sont répartis.
Pouvez-vous nous en dire plus sur les commissions de l’AFE ? Combien il y en a-t-il et quel est leur rôle ?
Les commissions n’ont rien d’obligatoire mais sont un mode de fonctionnement, une structure de travail. Elle peut donc en créer, en fonction des besoins mais sans dépasser le nombre de 6. Les membres sont repartis de façon égale dans ces commissions. Un domaine de compétences est dévolu à chaque commission. Le nombre de commission, leurs compétences ainsi que leur mandat peut varier. Chaque commission étudie les thématiques de son ressort, peut procéder à des auditions, faire des rapports thématiques, et proposer résolutions et motions au vote de l’AFE. Leurs travaux doivent obligatoirement être validés par l’AFE. Les commissions n’existent pas par elles-mêmes mais dans le cadre de l’AFE.
L’AFE peut, si elle le choisit, se donner une autre façon de travailler par des groupes de travail ou des débats par exemple.
Quel est le rôle des groupes politiques à l’AFE ?
Les groupes ne sont pas une structure de l’AFE et ne sont pas évoqués dans la loi ou le décret. Seul le règlement intérieur en prévoit. Leur existence peut faciliter un certain nombre de décisions, de nominations ou répartitions. Lorsque qu’ils sont nombreux cela peut au contraire poser problème. La pratique a montré que les groupes laissent un certain nombre d’élus non représentés lorsqu’ils ne sont pas dans un groupe. Cela devient un véritable problème lorsque ces élus non-inscrits sont plus nombreux que ceux de l’un ou l’autre groupe, ce qui fut le cas les dernières années en particulier lorsque les groupes prennent le pas sur le Bureau.
En tant que vice-présidente de l’AFE, quel regard avez-vous sur les 7 dernières années. Quels ont été les écueils ? Pouvez-vous nous dresser un bilan de l’Assemblée au cours de ces sept dernières années ?
Le regard que je peux avoir n’est pas tant celui de la vice-présidente que j’ai été mais plutôt en tant que membre de cette AFE en comparant avec ce qui existait auparavant.
Concernant le fonctionnement, ces 7 dernières années, la présidence d’un élu n’a rien apporté de concret, bien au contraire, en particulier vis-à-vis de l’administration. Le nombre des commissions est à mon avis trop élevé. Il me semble plus adéquat de restreindre leur nombre pour qu’il y ait au moins 20 membres. En dessous, la réflexion et les débats sont limités. Elles ont également manqué de temps. C’est une conséquence directe de la réforme puisque nous avons perdu une demi-journée de réunion. De même la réduction à deux sessions écourtées freine les travaux.
Concernant ceux-ci, ils ont donc été bien souvent marqués par un manque de suivi d’une session à l’autre, par exemple en matière de réponses aux textes. Les rapports se sont souvent cantonnés à la commission, ne sont plus discutés en séance. Le débat contradictoire a donc aussi manqué.
Les réductions en personnel du secrétariat général, les conditions de travail et bien entendu les conditions de réunions dues à la pandémie ne sont, bien entendu, pas pour faciliter et améliorer le travail des élus. On regrettera bien entendu l’absence de réponses tant de l’administration que du gouvernement aux textes votés.
Les « résultats ou avancées » sont depuis toujours des petits pas. On notera par exemple en début de mandat les avancées en matière de simplifications administratives réclamées depuis de nombreuses années, ou encore en matière de certificats de vie, résultat de négociations constantes avec les représentants de la CNAV à la commission des affaires sociales. Enfin nous avons été écoutés sur la problématique COVID .
A titre personnel, j’ai pu être auditionnée à de nombreuses reprises sur divers sujets à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Malheureusement les parlementaires tiennent plus compte de considérations politiques et de l’avis de l’administration que des élus des Français de l’étranger. Par contre nous avons réellement joué notre rôle au sein du bureau de vote électronique où nous avons été entendus.
Sur ces 7 dernières années, il est clair que nous avons perdu plusieurs mois en début de mandat. Avant, l’AFE était renouvelée par moitié donc lors de la session après renouvellement, si la première journée était consacrée au renouvellement des vice-présidents et des commissions, le travail commencé aux sessions précédentes par au moins la moitié des membres (non renouvelables) se poursuivait sans problème. Avec une AFE totalement nouvelle, tout est à redémarrer, avec de nombreux nouveaux élus (environ 50% en 2014) et ce sera beaucoup plus cette fois. On perd donc énormément de temps avant de pouvoir réellement travailler sur des dossiers. Les nouveaux, et c’est bien normal doivent trouver leurs marques. De même un renouvellement des présidents/ vice-président de commission, des membres tous les trois ans (voir deux) me semble souhaitable afin de pouvoir en changer le cas échéant. Enfin, travailler, se renseigner, partager son expérience pour ne pas être dépendant de l’administration.
Que faut-il savoir sur la première session constitutive de l’AFE ? Quels conseils donneriez-vous aux futurs nouveaux élus ?
Je m’abstiendrai bien de donner des conseils à qui que ce soit ! C’est la meilleure façon qu’on n’en tienne pas compte et l’expérience montre que les nouveaux élus détestent qu’on leur en donne. La situation est particulière cette fois car les « nouveaux » ne seront élus que depuis une semaine. Difficile donc en si peu de temps de former des groupes, d’avoir eu une réflexion sur les commissions, d’avoir préparé un règlement intérieur. En outre la session se tiendra pour partie en visio, ce qui ne facilitera pas les échanges et négociations inhérents à la mise en place.
Comme toute assemblée, il y a des textes qui encadrent et donc mon appel principal sera : respectez les textes, il ne s’agit ni de s’en affranchir ni de les interpréter. De même, pour être respecté, écouté il est nécessaire de se plier à certaines règles, normes, procédures propres à toutes les assemblées.
Enfin privilégiez les compétences.
L’AFE n’est pas faites pour faire valoir vos convictions politiques mais en premier lieu pour faire remonter et défendre les dossiers de nos compatriotes à l’étranger.
Le seul vrai conseil que peut être je formulerai c’est de tenir compte de ce qui a déjà été fait, des avancées obtenues au cours des années. L’AFE n’est que consultative. On ne peut faire avancer les choses que dans la continuité. En outre , on évite de perdre du temps en refaisant les mêmes études, rapports etc.