Pétrole, gaz, électricité… Le coût des sources d’énergie s’envole, mais aussi de toutes les matières premières, comme le bois. En conséquence, les prix augmentent pour les consommateurs alors que les taux d’intérêt remontent, faisant craindre un retour de l’inflation. Ce contexte ne manque pas de faire penser aux années 1970, lorsqu’aux deux chocs pétroliers s’ajoutaient la vie chère.
Comparaison n’est pas raison, mais nombre d’observateurs regardent l’avenir d’un air interrogateur. Rien ne dit que l’élection présidentielle, dans six mois, n’ait pas lieu sur ces sujets, qui affectent le quotidien des Français à l’entrée de l’hiver. Cette explosion des prix est due à plusieurs facteurs.
Le premier tient à la reprise économique après plus d’un an d’une activité mondiale à l’arrêt. La demande en énergie est tendue, notamment en Asie et en Chine, où l’économie tourne à plein régime.
Le second facteur relève, notamment en Europe, d’une transition écologique plus ou moins bien négociée. Au nom de la préservation de l’environnement, les énergies fossiles sont lourdement taxées quand les énergies renouvelables sont coûteuses à mettre en place. Dans ces conditions, l’approvisionnement coûte cher.
C’est dire si l’équation de la décarbonation de l’économie est compliquée. Penser que seuls les autres (taxe carbone aux frontières) ou les plus riches (par des mécanismes de redistribution) s’acquitteront de la facture est illusoire. La hausse des coûts de l’énergie pour tous est inexorable. Et elle sera difficilement compensée par des politiques conduisant à accorder des « chèques énergie », à réduire les taxes ou à ponctionner les producteurs. Autant de mesures qui ne peuvent être que provisoires et qui ne règlent pas le problème à sa racine.
La situation actuelle appelle deux remarques en ce qui concerne la France et l’Europe. La première vise notre capacité nucléaire qui, il y a peu encore, assurait 75% de notre électricité. L’objectif de réduire celle-ci à 50% est-elle atteignable ? Jamais les énergies renouvelables – on voit les difficultés du secteur éolien et solaire – n’arriveront rapidement à se substituer à cette industrie décarbonée. L’Allemagne, qui a abandonné l’atome, est obligée de faire repartir des centrales à charbon. La deuxième remarque renvoie à la construction européenne. Fondée au début des années 1950, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) n’existe plus depuis 2002. La construction d’un marché unique sur le front des sources d’énergie et matières premières reste imparfaite. Dans le domaine de l’électricité, l’Union peut certes se prévaloir de l’interconnexion des réseaux, qui permet d’appeler à tout moment la puissance disponible au meilleur prix.
Mais, comme le dit Nicolas Goldberg, consultant chez Colombus, « le marché reste très incomplet. On peine à s’entendre sur les objectifs de compétitivité industrielle et d’acceptation sociale, ainsi que sur les ambitions climatiques et les choix technologiques ». Le mix énergétique reste trop l’affaire de chaque État. Voilà encore un chantier qui mériterait davantage d’harmonie européenne.
L’équipe de l’ASFE