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Insurrections au Capitole : un essoufflement de la démocratie ?

Capitole

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La semaine dernière, le 6 janvier 2021, alors que le Congrès était appelé à valider l’élection de Joe Biden, l’Amérique a tremblé. Et le monde avec elle.

La plus grande démocratie du monde était en proie à des scènes de violence inouïes. Le Capitole, siège du pouvoir législatif des Etats-Unis, à Washington, était pris d’assaut par des hordes d’individus criant leur colère et détruisant tout sur leur passage. Ces derniers entendaient ainsi exprimer leur refus de la défaite de Donald Trump, battu par plus de sept millions de voix d’écart dans les urnes, le 3 novembre précédent.

Cet événement inspire trois commentaires. D’abord, il convient d’affirmer que la démocratie américaine est solide. Cela n’a pas été assez souligné. Donald Trump a tout entrepris pour remettre en question la victoire de Joe Biden : dans les médias, auprès de la justice, au sein du personnel politique, républicain comme démocrate. Il n’a pas réussi à inverser le résultat du scrutin. Les médias, à l’exception de quelques-uns, réputés radicaux, ne se sont pas laissés intimidés par les saillies du président sortant. La justice, y compris la Cour suprême où les juges conservateurs sont majoritaires, a rejeté, faute de preuves tangibles, tous les recours déposés par Donald Trump. Enfin, les élus républicains ont, pour la plupart d’entre eux, reconnu la défaite de leur candidat et refusé de le suivre dans ses débordements post électoraux.

Ensuite, il convient de remettre l’histoire à l’endroit. Donald Trump, président imprévisible et provocateur, n’est pas la seule cause de la radicalisation anti Washington, anti Etat fédéral, anti élites, d’une partie de la population américaine. Son élection, en 2016, en était bien davantage la conséquence. Il y a bien longtemps que nombre d’Américains nourrissent une féroce défiance vis-à-vis de l’Etat central et de ses impôts, qu’ils estiment responsables de tous leurs maux. Les divisions au sein du parti républicain entre conservateurs et ultra conservateurs (le « Tea Party ») se sont encore creusées ces dernières décennies. Donald Trump a su exploiter cet esprit contestataire et force est de constater qu’il y a réussi pendant son mandat.

Enfin, il convient de resituer cet épisode américain dans un contexte plus large. On ne peut s’empêcher d’établir des parallèles, même si comparaison n’est pas raison. En France, ces manifestants nous ont fait penser aux Gilets jaunes qui, il y a quelques mois seulement, s’en prenaient à l’Arc de Triomphe et voulaient marcher sur l’Elysée. Partout, dans le monde occidental, de Londres à Berlin, de Rome à Paris, de Madrid à Washington, se dessine une sérieuse crise de la démocratie. La défiance à l’égard des responsables publics ne cesse d’augmenter. D’après les études – surtout parmi les jeunes générations – l’attachement au régime démocratique comme mode de gouvernement diminue fortement. Les « victimes » de la mondialisation expriment leurs angoisses et leurs refus de voir leur vie leur échapper, leur horizon s’assombrir. Il est donc urgent d’ouvrir les yeux pour que, dans le débat public, la démagogie ne prenne pas le pas sur la raison. Il est également nécessaire de nous remettre profondément en question. Il y va de l’avenir de la démocratie et de nos libertés.

L’équipe de l’ASFE

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